Un athlète, un modèle, une source d’inspiration

Insérés dans l’en-tête de son blog, le drapeau libanais, l’image d’un casque de protection et ces trois expressions: «Constamment, patiemment, avec succès.» Des mots qui représentent sa vision de la vie, lui qui a réussi à se surpasser à maintes reprises. Lui qui, après un grave accident de travail survenu en 1995 et qui l’a laissé paraplégique, est parvenu à rebondir, à se reconstruire et à se créer une nouvelle existence.
Quel bel exemple de résilience!

Deux ans seulement après son accident, Edward Maalouf commence à s’entraîner intensivement et devient en 2005 cycliste à main professionnel. Aujourd’hui, presque deux décennies après sa malheureuse chute du 6e étage d’un immeuble en construction, cet athlète doublement médaillé de bronze en cyclisme à main aux Jeux paralympiques de Pékin est parti à la conquête de l’or à Londres.
En tapant son nom sur un moteur de recherche, on tombe rapidement sur des appels de soutien à Edward Maalouf qui se bat – sous les couleurs libanaises – presque sans aucun support officiel du gouvernement libanais. Une honte! Une honte aggravée par le fait que c’est nous qui avons besoin d’Edward Maalouf, de l’image qu’il véhicule et de la bouffée d’espoir qu’il transmet.
Dans une entrevue accordée après ses excellents résultats (malgré des problèmes de santé) aux Jeux de Pékin, Maalouf adresse un mot aux Libanais souffrant de handicaps. «...Je suis sûr que si j’ai pu le faire, ils peuvent également y parvenir, affirme-t-il. Ils doivent se battre pour atteindre leurs objectifs.»
Un précieux message et une leçon de vie qui peut servir à chacun de nous.

Une chercheuse libano-canadienne s’intéresse à la dépression chez les femmes enceintes

Le Dr Rima Azar, professeure adjointe en psychologie de la santé à l’Université Mount Allison (Canada), dirige une étude clinique qui vise à étudier le lien entre la dépression et l’anxiété chez la femme enceinte et le nouveau-né.


Elle a gardé dans son regard le soleil du Liban, son pays d’origine, qui, lorsqu’elle l’a quitté à l’âge de dix-sept ans pour s’installer au Canada, saignait, lacéré par la guerre civile. « Des barrages coupaient les rues et, plus grave encore, d’énormes barrières psychologiques séparaient les gens », se rappelle le Dr Rima Azar. Un vécu qui n’est peut-être pas étranger à l’objet de ses recherches en psycho-neuro-immunologie (l’étude des interactions entre les processus psychologique, neuronal, endocrinien et immunitaire dans le but d’élucider leur impact sur la santé). Un domaine de recherche relativement nouveau et multidisciplinaire. « L’étude que nous menons présentement se penche sur l’humeur dépressive et anxieuse de la femme enceinte, les marqueurs pro-inflammatoires pendant la grossesse et la croissance du fœtus », poursuit le Dr Azar qui dirige, depuis 2008, le Laboratoire de psychobiologie du stress et de la santé à l’Université Mount Allison (MTA) au Nouveau-Brunswick.

Un parcours académique et professionnel des plus intéressants
Après une maîtrise en psychoéducation et un doctorat en psycho-neuroendocrinologie développementale obtenu en 2005 de l’Université de Montréal (l’UdeM) – sa thèse, mention remarquable, a été classée par l’UdeM parmi les 10 % meilleures du domaine –, le Dr Azar complète un stage postdoctoral de quatre ans au Réseau universitaire de la santé, Université de Toronto, dans le domaine de la psycho-neuro-immunologie et les maladies coronariennes, avant d’accepter en 2008 un poste académique à MTA et d’obtenir sa permanence en 2012.
Au mois de mai passé, suite à l’obtention d’un fonds de démarrage pour leur recherche, octroyé par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), le Dr Azar et son équipe, composée d’un obstétricien, d’un spécialiste du développement des enfants, d’un épidémiologiste et d’un anthropologue, entament la première phase de l’étude. Le Dr Azar a également reçu une bourse salariale pour nouveau chercheur des IRSC/Programme de partenariat régional-Nouveau-Brunswick, qui lui permet d’alléger sa charge d’enseignement pour consacrer plus de temps à la recherche. « Deux cents femmes dans leur première grossesse, et leurs fœtus/nouveau-nés, participent à l’étude, qui nous permettra de déterminer si les sentiments anxieux ou dépressifs chez les mères sont associés à une croissance fœtale réduite », précise le Dr Azar. La recherche, longitudinale, a pour ambition d’étudier dans sa phase postnatale la réaction des nouveau-nés au stress et leurs réponses inflammatoires en lien avec de futurs risques cardio-vasculaires.
En plus d’apporter de nouvelles connaissances, l’étude, d’une durée de trois ans, aura des implications importantes pour la pratique et la politique de la santé prénatale. « Les résultats sensibiliseront les médecins sur l’importance de la détection précoce des symptômes dépressifs de la femme enceinte d’un côté. D’un autre côté, ils serviront de base pour une étude ultérieure visant à élaborer et tester de brèves interventions afin de réduire la dépression subclinique (dépression d’intensité très légère, située sous le seuil diagnostique) », explique le Dr Azar.

La prévention de la maladie coronarienne
Passionnée par la recherche, le Dr Azar, pour laquelle « toute situation est une occasion d’apprentissage », travaille également sur le dosage de la protéine C-réactive (CRP), un marqueur de l’inflammation, chez les individus jeunes et en bonne santé exposés à la fumée du tabac. « Mon objectif à long terme pour les deux lignes de recherche est la prévention de la maladie coronarienne », affirme-t-elle.
La chercheuse, qui confie que ce qu’elle apprécie le plus de son métier, c’est le contact humain, projette de faire des recherches sur la dépression parmi les détenus dans les pénitenciers. « Je m’intéresse également à l’adaptation au stress, tant sur le plan physiologique que psychologique, indique le Dr Azar qui avait travaillé, au cours de ses recherches antérieures, avec des parents d’enfants atteints de maladies chroniques. Je planifie de débuter un projet pilote avec des gardiens de prison à sécurité maximale pour évaluer leurs sources et niveaux de stress, le risque d’épuisement professionnel et les stratégies d’adaptation développées. Cela dans le but de contribuer à améliorer leurs conditions de travail. »
Des conseils qu’elle répète à ses étudiants : « Cultivez votre sens critique. Questionnez les articles scientifiques certes, mais aussi l’information massive sur Internet et les articles dans les journaux. » Des recommandations universelles, valables pour tous les étudiants. « Dans le contexte sociopolitique actuel au Liban, cette approche scientifique aidera les jeunes Libanais à demeurer critiques face au risque de désinformation ou de rumeurs non fondées présentées parfois comme des certitudes », souligne le Dr Azar.
La chercheuse, qui, à ses débuts, « rêvait comme tout jeune de changer le monde », le fait à sa manière, elle dont l’une des publications dans la très sérieuse revue scientifique Biological Psychiatry a été qualifiée par les éditeurs comme « une étude ayant conduit à d’importantes conclusions particulièrement précieuses pour la communauté ». 

Lumières !

Que savent les étudiants de Ghassan Tuéni? Que savent-ils des (autres) grands intellectuels du pays du Cèdre? Peut-on généraliser? Sûrement pas. Mais force est de constater que la petite enquête journalistique, publiée il y a quelques jours par un quotidien arabophone auprès d’un certain nombre d’étudiants en journalisme, est inquiétante. «Qu’avez-vous appris, au fil de vos lectures ou au cours de votre scolarité, sur Ghassan Tuéni ? » a-t-on demandé à des journalistes en devenir.
Les réponses – peu satisfaisantes – de ces femmes et hommes du Liban de demain « ne reposent pas sur un fondement solide », rapporte le journal. Les étudiants – issus de la même filière – ont avancé différentes interprétations quant à leur manque de connaissances. « Le curriculum qui s’appuie uniquement sur des cours théoriques », « Le gouvernement qui ne s’intéresse pas aux grands intellectuels de leur vivant, attitude copiée par l’université », « Les étudiants qui ne lisent pas assez et qui ne cherchent pas à se cultiver » et même, selon un étudiant, « des divergences avec la pensée de Ghassan Tuéni, d’où l’absence des articles, textes et autres œuvres de ce grand journaliste ».
La faute du programme d’études, des jeunes eux-mêmes, de l’énorme quantité de savoirs à véhiculer aux étudiants, comme l’a suggéré un responsable universitaire ? Peu importe les causes, les conséquences de cette pauvreté de connaissances risquent d’être dévastatrices pour un peuple qui cherche encore son identité.

Peut-on compter uniquement sur les initiatives individuelles et les lectures personnelles des étudiants pour la transmission de l’héritage de nos grands penseurs aux futures générations et, en conséquence, pour la sauvegarde de notre patrimoine culturel? Ne doit-on pas intégrer dans les cursus les grands visages du pays du Cèdre, surtout ceux de grands intellectuels tels que Ghassan Tuéni qui fait l’unanimité de tous les Libanais?
Nous appelons le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur à introduire d’urgence les grands penseurs libanais, et à leur tête Ghassan Tuéni, dans les programmes scolaires et dans toutes les filières universitaires, à l’instar des cours de civilisation dans les universités américaines. Sinon, la vraie question qui s’impose serait: que restera-t-il du Liban demain? 

Making Waves, au-delà de la natation

Dans son nom, le clapotis de l’eau, l’écume des vagues, les rires des enfants. Car ce club étudiant concerne les enfants. Mais pas n’importe lesquels. Des filles et des garçons (de 3 à 17 ans) ayant des déficiences physique ou mentale. « Notre premier objectif est de permettre à ces enfants de connaître, comme tous les autres, un simple plaisir, celui d’être à l’aise dans l’eau et de nager », explique Farah Abi Mosleh, étudiante en agriculture à l’AUB. La jeune fille de dix-neuf ans est la présidente du club Making Waves Lebanon qu’elle a fondé il y a quelques mois, avec une poignée de jeunes, Sara Zeidan, Katia Maroushe et Roy Naoum Taoutel, tous étudiants à l’AUB. « Outre les cours personnels de natation, nous voulons donner à ces enfants une chance d’enrichir leurs aptitudes sociales et de se faire de nouveaux amis », poursuit Farah.
L’histoire a commencé l’été passé, lorsque Farah et ses camarades se sont engagés comme volontaires dans un camp d’été pour enfants déficients visuels, tenu à l’USJ. « Nous y avons rencontré Alia Jan, membre de Making Waves Canada, organisation étudiante fondée en 2004 par des étudiants de l’université McGill », précise Farah. De son contact avec les petits, la jeune étudiante raconte : « C’était la première fois que je m’occupais d’enfants ayant des besoins particuliers. Une expérience marquante. On découvre chez eux des capacités qu’on ne soupçonne même pas. » Farah se rappelle « la joie indescriptible » du jeune Mehdi (15 ans) lorsqu’il a sauté dans l’eau. « Nous étions tous dans la piscine à l’encourager. » Mehdi a appris à nager en quatre sessions. « Mais ce n’est pas toujours le cas. Il faut prendre le temps, rassurer l’enfant et parfois lui apprendre des choses basiques qu’il ne connaît pas », explique Farah. À la fin du camp, Alia propose aux jeunes étudiants de l’AUB de fonder une section de Making Waves dans leur université. C’est le début de l’aventure.

De gauche à droite : Omar Daouk, Sara Zaidan, Jad Abiad, Farah Abi Mosleh, Roy Taoutel et Katia Marroushe.

La naissance de Making Waves Lebanon est difficile. « Il fallait convaincre l’AUB de nous accorder l’autorisation de créer ce club à l’université, collecter des fonds, trouver une piscine », poursuit Farah, qui insiste sur le soutien de Mme Amal Yehya, directrice de l’école New Orient Academy. « Elle fut la première à nous aider. Nous apprécions énormément son appui », répète-elle. Pour le financement de leur club, les jeunes étudiants participent à des événements tenus à l’AUB et organisent une soirée karaoké dans un restaurant à Hamra. « C’était très réussi. 110 personnes ont répondu à l’appel. On ne s’attendait pas à un tel succès. »
Aujourd’hui, les fonds sont là. Les jeunes vont pouvoir louer la piscine qu’ils ont « trouvée » dans un gym à Koraytem. En attendant de commencer les séances de natation avec les enfants, Farah, Sara, Katia et Roy sont plus motivés que jamais. Farah conclut : « Nous espérons qu’en 2013, Making Waves s’étendra à plusieurs universités libanaises et que cette association deviendra une vraie ONG. Les enfants ayant des besoins particuliers ont de grands potentiels. Il faut leur donner les moyens de les développer. » 

Un texte, tristement d'actualité, que j'ai écrit il y a des années...

Par Roula AZAR DOUGLAS


Il y a quelques années, je pensais que mes souvenirs s’étaient estompés jusqu’à s’effacer complètement devant les jours qui passent, devant mes voyages et mes nouvelles expériences, devant mon bonheur de vivre, devant mon mariage, devant les rires de mes deux garçons.

Non, je n’ai rien oublié.

Il a suffi d’un son, d’une image, d’une odeur, d’un incident, d’un 12 juillet pour que je me rende compte que tout est là, intact. Intactes sont les images d’horreur, intacte est la peur qui me dévore de l’intérieur, intact est le dégoût face à cet aspect Mister Hyde dans chaque être humain, intact est le désespoir qui surgit sans avertissement et tente inlassablement de m’attirer au fond d’un gouffre sans fond, intact ce rejet de toute forme de violence même verbale, intacte cette phobie de toute personne en uniforme, intacte cette angoisse de la mauvaise nouvelle à chaque sonnerie du téléphone.

Non, je n’ai rien oublié.

Je me souviens d’événements que j’aurai peur de rapporter par crainte que mes enfants ne les lisent, par crainte que d’autres enfants ne les lisent. Mais, finalement, c’est pour ces enfants que je vais exorciser les démons de la guerre. C’est pour éloigner le spectre d’une nouvelle guerre civile que je vais écrire...

Je me souviens de ce jour d’été, j’étais encore une enfant. J’entends un bruit métallique répétitif suivi par les cris de mes sœurs cadettes, Rania et Rima. Je revis cet étrange sentiment qui m’envahit : un mélange de peur et de curiosité. Je cours au balcon de notre appartement. Et je m’arrête net. J’ai l’impression que si je tends la main, j’arriverais à toucher ce char qui s’ouvre difficilement un passage dans les ruelles de mon quartier. Tout est figé. Le temps s’est arrêté. Le sang glacé, les yeux exorbités, je regarde horrifiée, sans vraiment comprendre. Soudainement, après ce qui me semble être une éternité, je reprends contact avec la réalité. Les doigts glacés de ma mère qui me serrent le bras me font froid, j’entends sa voix durcie par l’angoisse et la peur : « Roula, rentre vite au salon ! » Ce qu’elle me dit résonne dans mes oreilles, mais ne rencontre aucun écho dans mon conscient. Mes jambes sont molles. Elle n’a d’autre choix que de me pousser vers l’intérieur. Je ne suis pas capable de discuter avec elle de ce que j’ai vu. La nuit, je n’arrive pas à m’endormir. Et malgré les murs qui séparent notre chambre de celle de mes parents, j’entends clairement une partie des propos qu’ils échangent : – « Antoine, les filles ont tout vu ! Ces monstres ! Ces brutes ! Ces barbares ! Ils traînaient un homme sur la chaussée, derrière le tank ! Il avait les poings et les pieds liés !
– Calme toi, Robine. Ne réveillons pas les filles. »

Je me souviens, comme si c’était hier, de la panique de mes camarades de classe quand, lors d’un cours d’histoire, une pluie d’obus s’est abattue sur notre quartier. Je ressens ma peur et mon angoisse. Je me rappelle très bien de la frénésie des enseignants et des religieuses cherchant à mettre de l’ordre dans la ruée des élèves hors des classes et les dirigeant vers la cantine pour s’abriter. Je vois leurs visages blêmes quand ils se sont rendu compte qu’à la cantine, il y avait de grosses bonbonnes de gaz rendant l’endroit dangereux. Je vis encore ce soulagement ressenti à l’arrivée de papa. Il me serre la main très fort comme s’il a peur de me perdre. Je me rappelle du retour à la maison. Ce chemin, mille fois emprunté, mais qui, ce jour-là, semble se dilater indéfiniment...

Je me souviens des yeux confus et évasifs d’une copine, après une semaine d’absence de l’école. Je pense à l’attroupement des camarades autour d’elle, ne sachant quoi lui dire ni comment la consoler. J’entends leur chuchotement : « La pauvre, son père a été tué par l’explosion d’une voiture piégée. »

Je me souviens de longues nuits passées à l’abri, dans la pénombre et l’humidité. Je me souviens des heures interminables, accrochée au combiné du téléphone, priant pour la sécurité des proches et amis, attendant la ligne qui ne « vient » pas...

Je me souviens de mon « bizarre » réveil une certaine nuit de septembre 1978. Je me rappelle des mots exacts pour ma sœur : « Rania, tante Ramona est morte. » Personne ne me l’avait dit, mais je le savais. Je vois encore la frustration de ma famille de ne pas pouvoir assister à l’enterrement ; la ville étant assiégé. Plus tard, à plusieurs reprises, Rania et moi avons cru la rencontrer au coin d’une rue avant de nous rappeler qu’elle est « partie ». À chaque visite de condoléances, mes sœurs et moi captions des bribes de conversation des « grands » : la tasse de café turc est restée intacte sur sa table de chevet ; elle est morte dans l’abri, avec tous ses voisins ; l’abri était mal construit ; elle ne voulait pas quitter la ville par crainte de perdre son emploi à la banque, elle avait 40 ans...

Je me souviens de nos fuites sous les bombes vers le port de Jounieh, des petites chaloupes empruntées dans la nuit noire, de l’échelle-corde au-dessus de la mer sombre qu’il fallait emprunter pour prendre le bateau de commerce, en pleine mer. Je me souviens des chansons militaires à la radio, des photos de jeunes martyrs aux murs de ma ville, des sirènes des corbillards mortuaires. Je me rappelle des lamentations, remplacées plus tard par des gémissements d’une voisine meurtrie par la perte de son fils de 18 ans et que nous entendions pendant des mois, chaque nuit, quand le silence se faisait dans notre quartier.

Je me souviens de cette dernière image que j’ai de la guerre civile dans mon pays : je vois le trottoir devant notre immeuble, à Achrafieh, envahi par nos amis, nos proches et nos voisins ; je vois les larmes sur leurs joues ; je vois leurs gestes d’adieu et je me revois avec mes parents et mes sœurs prenant place dans ce taxi qui nous emmenait vers l’aéroport. Dans la voiture, personne n’osait prendre la parole par peur d’éclater en sanglots. C’était le 16 juin 1990 et nous fuyions vers le Canada…

Quand un groupe d’étudiants fait renaître un magazine




De gauche à droite, Camille el-Khoury (directeur administratif), Brahim Najem (directeur de rédaction), Jad el-Youssef (rédacteur), Celine-Marie el-Chami (rédactrice en chef adjointe) et Pascal Watwat (directeur général). 


« Certains voient les choses telles qu’elles sont et demandent pourquoi ; je rêve de choses impossibles et me dit pourquoi pas. » C’est la citation – de Kennedy – que Hala Abou Charaf, étudiante en troisième année d’économie à l’USJ, a choisie pour introduire son éditorial de rédactrice en chef du premier numéro d’ÉcoLibre paru en avril passé. ÉcoLibre, le magazine des étudiants de la faculté des sciences économiques de l’USJ, qui « a servi de porte-voix aux étudiants assoiffés de liberté dans les années 90, un rôle qui a été souligné dans le film Rue Huvelin, précise Pascal Watwat, président de l’amicale étudiante et directeur général de la publication estudiantine. ÉcoLibre – qui paraissait sous forme de dépliant distribué uniquement sur le campus de la rue Huvelin – n’était plus publié depuis 2008 ». « Faire revivre ce magazine était l’un des plus grands projets autour desquels s’est articulée notre campagne lors des élections estudiantines, au début de l’année universitaire », poursuit Pascal. Le défi a été relevé et la promesse tenue. Il y a quelques semaines, c’est un magazine d’une centaine de pages – bien illustré, riche en articles variés rédigés majoritairement par des étudiants et traitant de sujets divers dans différents domaines tels que la finance, le droit, la politique, l’écologie, la culture, la mode et le cinéma – qui a été distribué sur les campus.
« Les rédacteurs sont issus de toutes les facultés. Nous avons voulu également nous ouvrir sur d’autres universités, notre but étant d’enrichir nos articles par des regards différents », confie Pascal Watwat, qui s’est également occupé de la conception graphique du magazine. « Nous avons tout fait nous-mêmes : le choix des sujets, la rédaction des articles, la conception graphique, la maquette, la mise en page. Ce qui nous a permis d’épargner quelque 2 000 $ », indique Brahim Najem, directeur de rédaction et étudiant en 3e année d’économie à l’USJ. Cela représente 60 % du coût total, qui est de 3 000 $ environ couverts en grande partie par des sponsors sollicités par les étudiants eux-mêmes.
Outre Pascal, Hala et Brahim, le comité de rédaction compte également deux autres étudiants : Céline el-Chami, rédactrice en chef adjointe, et Camille el-Khoury, directeur administratif et financier, qui s’est occupé du site Web, du finissage technique et de la distribution. À savoir que plus de 2 500 copies d’ÉcoLibre ont été distribuées sur les campus de l’USJ.
Sur la couverture de ce premier numéro d’ÉcoLibre, une photo du bâtiment – partiellement ensoleillé – de la faculté d’économie sur la rue de Damas. Pascal précise : « Nous avons choisi cette photo pour l’ombre et la lumière. Nous voulons que notre magazine, ressuscité dans un nouveau concept professionnel, puisse, à l’instar du soleil dans la photo, apporter un éclairage différent sur l’économie, la culture et l’actualité. »


Il est temps que la profession d’infirmier soit reconnue à sa juste valeur






Ils sont quelque 10 000 au Liban à exercer la profession d’infirmier. Des milliers de femmes et d’hommes dont la mission consiste, d’après la définition qu’en donne l’OMS, à aider les individus, les familles et les groupes à déterminer et réaliser leur plein potentiel physique, mental et social. Leurs fonctions sont variées et vont du maintien et de la promotion de la santé à la prévention des maladies. Indispensables, ils le sont sans aucun doute. Recherchés aussi, surtout dans les régions et depuis que le phénomène d’émigration des infirmiers est devenu une triste réalité au Liban. Pourtant, ces professionnels de la santé souffrent encore, malgré les efforts soutenus et les réclamations constantes de l’ordre des infirmiers et infirmières au Liban, de conditions de travail inacceptables. « Nous sommes désolés de vous informer que nous n’avons pas atteint les objectifs que nous nous sommes fixés, et cela malgré les demandes insistantes et répétées auprès des responsables et des instances concernées », a déclaré Mme Claire Ghafari Zablit, présidente de l’ordre des infirmiers et infirmières au Liban, lors de la conférence de presse tenue le jeudi 10 mai, dans les locaux de l’ordre, à Sin el-Fil, à l’occasion de la Journée internationale des infirmières. Les revendications, fort réalistes et tout à fait légitimes, portées par l’ordre des infirmiers et infirmières au Liban sont : l’ajustement des salaires en tenant compte de la situation économique, des diplômes détenus et des fonctions occupées ; la mise en place de contrats de travail entre les journaliers et les employeurs ; la reconnaissance des diplômes et la réduction du temps de travail à 42 heures par semaine. « Nos revendications portent également sur l’octroi de primes annuelles et d’indemnités pour le travail les jours fériés, l’établissement d’une assurance santé et des vacances annuelles », a affirmé Mme Zablit. Des infirmiers et des infirmières de tout âge et de toutes les régions du Liban, des défenseurs de la cause infirmière et de nombreux journalistes ont assisté à la conférence. « Pourquoi doit-on accepter de travailler de longs mois sans toucher de salaire ? » s’est écriée une infirmière présente lors de la conférence de presse. Une autre a confié avoir peur de se plaindre auprès de l’ordre par crainte des représailles. « J’ai peur de perdre mon travail si je me plains. » Par ailleurs, les infirmiers souffrent encore de stéréotypes ancrés dans la pensée commune et véhiculés par les médias. L’image la plus répandue est celle de « l’ange de miséricorde » qui se « sacrifie » pour les autres. Des stéréotypes contre lesquels l’ordre des infirmiers et infirmières au Liban lutte depuis des années. Dans cette optique et pour inciter les jeunes à choisir la profession d’infirmier, l’ordre a réalisé un court-métrage – à diffuser dans les écoles secondaires – mettant en scène de jeunes infirmiers et infirmières passionnés, fiers et motivés, qui racontent leur métier. Environ 500 infirmiers sont diplômés des universités libanaises par an. Un chiffre bien en deçà de la demande des hôpitaux.

Pour toutes ces raisons, je l’aime


Par Roula AZAR DOUGLAS | samedi, mai 5, 2012

Il y a mille et une raisons de « désaimer » le Liban. Pourtant, dans les milliers de messages nés de l’initiative de Philippe Abou Zeid sur Twitter, c’est de son sentiment d’amour envers le pays du Cèdre que l’on parle. Le jeune homme de 28 ans, diplômé en sciences politiques de l’USJ et en journalisme de l’Université libanaise, raconte : « En discutant avec des amis, la veille de la commémoration
de la guerre civile libanaise, j’ai réalisé que rien n’encourage les jeunes à rester au Liban. C’est à ce moment que j’ai eu l’idée de créer un trend sur Twitter (#ILoveLebanonBecause) pour contrer l’atmosphère négative qui sévit dans le pays. » Le jeune homme décide alors de créer « une situation de solidarité en ligne afin d’inciter les gens à oublier la guerre, de provoquer une réflexion positive sur le Liban et le plus important : de porter les Libanais à réaliser qu’ils aiment toujours et pour toujours leur pays ». Derrière son initiative, l’amour pour sa patrie, mais aussi pour sa petite sœur Carmen âgée de 15 ans qui, elle aussi, rêve de s’envoler vers de nouveaux cieux. « Je veux donner aux jeunes et à ma sœur en particulier des raisons de ne pas quitter le Liban. »






C’est ainsi que Philippe invite ses abonnés (followers) à partager avec les autres utilisateurs les raisons pour lesquelles ils aiment leur pays. Des milliers de Libanais répondent à l’appel. Son initiative, encouragée à ses débuts par les « tweets » (messages sur Twitter) de personnalités médiatiques comme Marcel Ghanem et Neshan Derharoutounian ou de la chanteuse Élissa, connaît rapidement un franc succès. Un flot de commentaires positifs, souvent drôles et originaux, déferle sur Twitter. « Au cours des premières 24 heures, 1 500 tweets liés au #ILoveLebanonBecause sont postés, générant plus de 1 251 000 impressions (personnes ayant lu le tweet sur leur page) pour une audience de plus de 364 000 abonnés », affirme Philippe. Des chiffres élevés qui ont pourtant été dépassés le lendemain, cette marée numérique laissant peu de jeunes Libanais actifs sur Twitter indifférents. « Aucune figure politique n’a participé. Ce qui a préservé cette campagne de toute politisation », tient à souligner Philippe, qui travaille comme producteur-reporter à l’émission Kalam el-Nass. Le jeune homme, qui a l’intention de rassembler bientôt les messages postés sur Twitter dans une publication papier, conclut : « Je rêve d’un jour où l’on puisse écrire : j’aime le Liban car c’est plus qu’un pays, c’est un paradis. »

Le dopage, bien plus qu’une tricherie

Par Roula AZAR DOUGLAS | samedi, avril 28, 2012

Le dopage tue. Il ne décapite pas uniquement le sport ou l’esprit de compétition. Il foudroie également la santé des jeunes sportifs. En Belgique par exemple, on rapporte depuis quelques années au moins un décès annuel des suites de la consommation de produits anabolisants. En France, deux jeunes joueurs de rugby ont développé il y a quelques semaines un cancer qui serait lié à la consommation d’une substance achetée sur Internet. Dans le monde entier, le dopage constitue une menace pour le sport et les sportifs. Le Liban ne fait pas exception. Une étude publiée en février 2012 par le Journal of nutrition and metobolism indique que plus de 36 % des personnes fréquentant des salles de gym à Beyrouth ont reconnu consommer des « compléments nutritionnels » sans supervision médicale étroite. Évidemment, tous les produits vendus sous le label de « suppléments alimentaires » ne sont pas néfastes et ne sont pas considérés comme dopants. Mais en l’absence de mesures serrées de contrôle et d’inspection des substances vendues dans les boutiques du coin, sur les chaînes de télévision (!), sur le Net, et dans les clubs de sport « sous le manteau », un danger bien réel guette les jeunes sportifs, et particulièrement ceux qui cherchent par tous les moyens à améliorer leur performance physique ou augmenter leur masse musculaire. Sachant que les sportifs amateurs ne sont pas (ou rarement) soumis à des contrôles antidopage.
L’institut de physiothérapie de l’USJ, conscient des dangers du dopage, offre une formation intitulée « Dopage : pratiques sportives et contrôles ». Cette formation de dix heures est offerte dans le cadre du master en physiothérapie. « Mais elle peut être ouverte aux physiothérapeutes, aux entraîneurs et même aux sportifs qui le souhaitent », affirme Mme Nisrine Abdelnour Lattouf, directrice de l’institut de physiothérapie de l’USJ. L’objectif de ce cours est de faire connaître les pratiques du dopage et d’apprendre aux jeunes et à leur entourage à discerner entre alimentation, traitement et dopage. « Il a pour but aussi de souligner les effets néfastes de cette pratique et d’inciter à la lutte contre la consommation de produits dopants », poursuit Mme Lattouf. La formation est dispensée par M. Jihad Haddad, physiothérapeute, officier international de contrôle de dopage au sein du Comité olympique d’Asie et à l’Agence mondiale antidopage.
« Au Liban, les structures sportives ne sont pas toutes pourvues d’un médecin ou d’un préparateur physique. Le physiothérapeute se trouve alors confronté à des situations qui exigent de lui une bonne connaissance du dopage, indique Mme Lattouf. Il y a des coachs qui conseillent aux joueurs de consommer des substances pour améliorer leur performance. D’où la nécessité de sensibiliser les physiothérapeutes et l’ensemble des acteurs dans le domaine sportif sur les dangers du dopage. »

La laïcité vue par les jeunes Libanais

Ils sont venus nombreux, au Bathish auditorium, pour écouter la conférence du Dr Fawaz Traboulsi sur la laïcité au Liban. Un évènement organisé le jeudi 12 avril par le Club laïc de l’AUB en commémoration de la guerre civile libanaise.

 
Rackel Mezher, étudiante en 2e année de génie chimique et membre du club, insiste dans son mot d’ouverture sur le lien direct entre le système confessionnel et la guerre civile. « Nous croyons que la laïcité garantit l’égalité de tous les citoyens et la liberté de chacun, dit-elle. Nous voulons sensibiliser les gens aux dangers du confessionnalisme. Le rôle de la laïcité dans l’édification d’un État de droit n’est pas une illusion. L’illusion est de croire que le système confessionnel peut perdurer. »

 
Devant un public très attentif, le Dr Traboulsi, professeur de sciences politiques à la LAU et à l’AUB, déplore l’amnésie officielle qui couvre la guerre. Le professeur, qui est aussi journaliste au quotidien as-Safir, dénonce la version officielle qui parle de la « guerre des autres au Liban ». Une théorie qui permet aux Libanais de fuir toute responsabilité dans la guerre qui a ravagé le pays pendant 15 ans. « Il n’y aura jamais une version unique de la guerre, conclut-il. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas s’informer, se documenter, communiquer, se rappeler et apprendre de la guerre. »

 
Le Club laïc – qui est totalement indépendant des partis et des courants politiques libanais – a été fondé il y a 3 ans par des étudiants de l’AUB dans l’objectif de sensibiliser la nouvelle génération sur les dangers du système confessionnel. « Nous avons également pour objectif de combattre les préjugés envers “l’autre”, qui se basent sur une haine et un désir de vengeance latents, et d’exposer notre vision de la laïcité au Liban comme seule alternative durable pour préserver le Liban libre, indépendant, souverain, démocratique et pluriel », affirme Jean Kassir, étudiant en 1re année d’économie et membre du club.
 

Les étudiants espèrent réussir l’expérience de ce club en tant que rassemblement politique alternatif laïque pour exporter le modèle à d’autres universités. « Il s’agit de démocratiser à fond l’idée en ayant des représentants ailleurs, dans d’autres facs, explique Jean Kassir. Nous ne voyons pas notre club comme un rassemblement élitiste limité aux étudiants de l’AUB. À cet effet, nous travaillons avec d’autres organisations avec lesquelles nous partageons les mêmes objectifs. »
 


Au Liban, la laïcité n’est pas pour demain. Cependant, une chose est sûre : le plus long chemin commence toujours par un pas.

Il est temps de lever l’injustice !

Par Roula AZAR DOUGLAS
L'Orient-Le Jour du vendredi 30 mars 2012


Je crois fermement à l’égalité des races, des nationalités, des personnes, de l’homme et de la femme. Égalité qui devrait être garantie par la loi, principe fondamental de tout État de droit. D’où l’urgence d’amender la loi sur la nationalité au Liban. Cette loi qui remonte à 1925 et qui m’empêche, à l’instar de milliers de Libanaises, de partager une grande partie de mon identité, mon appartenance à ma patrie, mes racines et mon histoire avec ce que j’ai de plus cher au monde, avec la chair de ma chair : mes enfants.

La loi actuelle permet à la femme palestinienne, jordanienne, irakienne, saoudienne, iranienne, syrienne, africaine, européenne, américaine, de devenir libanaise sans d’autres conditions que son mariage avec un Libanais. Plus grave, elle lui permet de transmettre sa nouvelle nationalité à ses enfants mineurs issus d’un précédent mariage avec un non-Libanais si ce dernier décède. Et ces enfants, nés donc de pères et de mères non libanais, pourront à leur tour transmettre leur nationalité libanaise à leur progéniture. Quand moi et des milliers de Libanaises ne pouvons pas transférer notre identité nationale à nos enfants. 

La loi actuelle permet à une femme de transmettre sa nationalité libanaise à ses enfants s’ils sont de père inconnu et m’empêche, moi et des milliers de Libanaises, qui connaissons le géniteur de nos petits, de bénéficier du même droit.Nombreux sont les politiciens qui prétendent être pour l’égalité des sexes et qui affirment que c’est uniquement la peur du changement démographique qui les empêche d’amender cette loi injuste et inacceptable. À ces hommes je dis : si vous êtes incapables d’égaliser la femme à l’homme en ce qui concerne la loi sur la nationalité, alors égalisez l’homme à la femme. La loi doit être la même pour tous les citoyens. Elle deviendra : « Est libanaise toute personne née de mère et de père libanais. » Combien de politiciens et d’enfants de politiciens se verront alors privés de leur nationalité libanaise ? L’accepteront-ils ? Sûrement pas. Pourquoi nous alors devrions l’accepter ? 


Le Liban a adhéré à la Charte des Nations-Unis qui stipule que tous les Hommes, sont libres et égaux et ont les mêmes droits sans discriminations entre les hommes et les femmes.
Malgré l’adhésion à la Charte des Nations-Unis et la signature des traités internationaux, il y a encore une grande discrimination vis-à-vis des femmes dans les lois et dans la réalité.  "Le statut civil est la base de la discrimination contre les femmes".


http://www.petitions24.net/petition_pour_les_droits_des_femmes_au_liban

Table ronde : Comment les journalistes libanais couvrent-ils les droits de la femme ?

Dans le cadre du cycle de débats « Journalisme et causes sociales »

LA MISSION CULTURELLE FRANCAISE AU LIBAN et L’ASSOCIATION D.E.S. FRANCOPHONE DE JOURNALISME (AFEJ)
 vous invitent à participer au débat intitulé :
Comment les journalistes libanais couvrent-ils les droits de la femme ?

Le Jeudi 24 février 2011 à 18H00 – Salle de Conférence
MISSION CULTURELLE FRANÇAISE – RUE DE DAMAS – ENTREE LIBRE

Les intervenants :
- Ghassan Moukheiber, député au Parlement libanais
- John Azzi, magistrat
- Roula Douglas, responsable de rédaction à l’Orient des Campus, activiste pour les droits de l’Homme
- Rima Abi Nader, chef de l’unité de support aux victimes et responsable du centre d’écoute de l’ONG « Kafa »

Le débat sera animé par Colette Chibani, rédactrice en Chef de « Noun » et membre de l’AFEJ.

Veuillez confirmer votre présence en cliquant sur le lien suivant:
http://www.facebook.com/home.php#!/event.php?eid=196850313661239

Table ronde

Dans le cadre du 17e Salon du Livre
francophone de Beyrouth,  les éditions Dergham ont l’honneur de
vous convier à une conférence autour du thème : «Écriture journalistique, écriture
romanesque: quelles différences?»

Intervenants : Roula Azar Douglas, Karen Boustany, Belinda Ibrahim et Alexandre Najjar.
Animation : Elsa Yasbek Charabati


le jeudi 4 novembre
à 18 heures
Salle Gibran - Biel

Loi sur la nationalité : Il est temps de lever l’injustice !



La colère et la frustration étaient palpables au lancement de la campagne « Pour amender la loi sur la nationalité au Liban », il y a quelques jours au Phœnicia. Campagne organisée conjointement par le programme des Nations Unies pour le développement (UNDP) et le comité national du suivi des affaires des femmes. Détails sur les conséquences de la loi de 1925 qui stipule dans son premier article : « est considéré comme libanais tout enfant né de père libanais ».

La salle est comble. Des femmes et des hommes directement concernés par la loi, mais aussi de très nombreux supporters de diverses tranches d’âge, de toutes les catégories sociales et de toutes les confessions. Un écran géant. Le spot télévisé de la campagne passe en avant première. L’image est forte. Un bébé, rose, bien portant, souriant. « Il est le portrait tout craché de sa mère, entend-on, ses yeux, son sourire…». Gros plan sur les mains, menottées, du bébé. «Tout, sauf sa nationalité, car son père n'est pas libanais ! » Les menottes, c’est la frustration et l’impuissance que ressentent les femmes libanaises, mères d’enfants non libanais. Et c’est aussi le manque de contrôle de ces enfants face aux répercussions de leur situation de non libanais sur leur vie de tous les jours et leur avenir.

Violation du principe d'égalité des citoyens. Injuste et discriminatoire, l’article en question est une violation du principe d'égalité des citoyens devant la loi. « La loi doit traiter équitablement les citoyens sans aucune discrimination. Au Liban, le fait de naitre fille implique la perte d’une partie de ses droits. Il n’y a pas de plus injuste qu’une loi inéquitable. Il faut lever l’injustice de la loi ! », martèle Ziyad Baroud, ministre de l’intérieur et fervent défenseur de l’amendement de la loi sur la nationalité. « On ne veut pas de mariages blancs. C’est certain. Mais il y a une grande différence entre interdire à la femme le droit fondamental à la transmission de la citoyenneté et le réglementer », assure-t-il. En insistant sur l’importance d’une bonne réglementation et d’un contrôle efficace de l’application de la loi si elle est amendée, le ministre de l’intérieur révèle que les réserves des politiciens à l’égard de ce sujet ne sont pas techniques mais politiques. « Les politiciens libanais ne font pas preuve de courage dans leur approche de ce sujet. Ils n’ont même pas accepté de le mentionner dans la déclaration ministérielle. Je comprends qu’ils aient un avis différent là-dessus mais il faut en discuter ». Actuellement, une femme non-libanaise mariée à un libanais, le devient par la loi, idem pour ses enfants. « Il arrive souvent qu’elle ne parle pas arabe, qu’elle ne connaisse rien à l’histoire de notre pays et qu’elle n’ait pas de projet de vie au Liban, on lui offre, ainsi qu’à ses enfants, la nationalité libanaise et moi, avec tout le souffle libanais qui m’anime, avec tout le sang libanais qui circule dans mes veines, avec tout mon patriotisme, avec toute ma passion envers mon pays, que je communique à mes enfants, je n’ai pas le droit de leur donner la nationalité ! Quelle injustice ! », crie Carla, mère de deux enfants italiens. Une injustice douloureusement ressenti par toutes les familles concernées : femmes, enfants et conjoints. Qu’ils soient de milieux très aisés ou défavorisés, qu’ils aient une nationalité occidentale ou arabe, ils en sont tous affectés. « Il ne faut pas minimiser l’impact de cette loi sur notre vie et celle de nos enfants. Je m’inquiète beaucoup de ce qui arrivera à ma mort. Dans le contexte actuel, mes enfants ne pourront pas hériter de mes propriétés », déplore une mère outrée. Une autre, les larmes dans la voix, raconte comment l’école publique à refuser d’admettre son fils de trois ans « car la priorité est aux libanais ». Touchants et poignants, les témoignages se multiplient. « Mon fils n’a pas le droit de jouer avec l’équipe nationale de football. » ; « On a interdit à ma fille de chanter l’hymne national à l’ouverture des jeux de la francophonie » ; « Renouveler le permis de séjour de ma fille est un vrai calvaire pour moi, les remarques désobligeantes des fonctionnaires, leur attitude nonchalante, l’attente... » ; « L’école a demandé aux élèves de présenter une copie d’une de leur pièce d’identité, pour une sortie. C’est ainsi que ma fille a découvert qu’elle n’est pas libanaise. Depuis elle est marginalisée par ses camarades. » ; « J’ai peur pour son avenir. Il veut étudier la médecine, mais pourra-t-il exercer au Liban ? » ; « Je n’ai pas les moyens de payer les frais de l’opération chirurgicale que mon enfant doit subir ». Et aussi, et surtout : « Je me sens impuissante. » ; « J’ai l’impression de n’être qu’une demi-citoyenne. »

Les palestiniens ne constituent qu’une petite partie des mariages avec des non-libanais. Les partisans de cette cause sont conscients que le problème palestinien est à la base de la résistance face à l’amendement de la loi, bien qu’à l’origine, en 1925, il n’existait pas. « Ça ne doit pas l’être, il suffit de lire les chiffres. Les palestiniens ne constituent qu’une petite partie des mariages à des non-libanais », répond Dr Aman Kabbara Chaarani, présidente du comité de suivi des affaires des femmes, se basant sur une étude longitudinale de 1995 à 2008. L’étude en question a recensé environ 18 000 mariages entre des libanaises, toutes confessions confondues, et des non-libanais. Moins de 22 % des conjoints non-libanais sont palestiniens. « La loi est dégradante à plusieurs égards. Les femmes palestiniennes mariées à des libanais obtiennent, elles et leurs enfants, la citoyenneté libanaise. Par contre, on a peur pour le Liban quand les femmes libanaises épousent des palestiniens ! C’est assumer qu’au Liban, on ne croit pas aux idées, aux opinions, à l’influence de la culture et de l’éducation ; On ne croit qu’à ce qui est marqué dans la case confession dans les pièces d’identité. N’est-ce pas considérer que les libanais ne sont pas capables de réflexion, de jugement et d’esprit critique ? À mon avis, cette loi est dégradante pour l’ensemble de la population ! » , s‘indigne Carla.

En faveur de l’amendement. Outre la campagne médiatique, une pétition est mise en ligne sur le site web www.lwrnl.org pour l’amendement de la loi sur la nationalité. Au moment d’écrire ces lignes, plus de 3000 personnes ont déclaré leur soutien à la campagne. Beaucoup d’hommes sont en faveur de l’amendement pour une égalité entre les citoyens. « Les enfants de toute femme libanaise, peu importe où ils se trouvent, sont libanais de cœur ; la loi doit l’admettre. Nous sommes fiers d’être libanais, mais comment l’être complètement quand la moitié de la population n’a pas les mêmes droits que l’autre moitié ? », s’interroge un jeune homme. Antoun, un autre supporter, s’indigne: « C’est inconcevable que mon fils puisse passer la nationalité libanaise à ses enfants et non mes filles. C’est une loi désuète et rétrograde. Il faut absolument la changer. » Laith, elle, est une brillante doctorante de 21 ans. Née de mère libanaise et de père non-libanais, la jeune femme a choisit de poursuivre ses études supérieures aux États -Unis. Elle témoigne : « Permettre à la femme libanaise de donner la nationalité à ses enfants ne bénéficiera pas uniquement à sa famille, il profitera aussi au Liban en empêchant la fuite des cerveaux. A l’obtention de mon diplôme, j’hésite à retourner au Liban puisque je n’ai pas la nationalité libanaise. Je connais de nombreux étudiants de mère libanaise comme moi, qui après un long parcours académique choisissent de rester à l’extérieur car le Liban ne leur accorde pas la citoyenneté. »

Il est à noter que quatre pays arabes ont donné dernièrement à la femme le droit de transmettre sa nationalité à ses enfants : la Tunisie, l’Égypte, le Maroc et Bahreïn. Au Liban, malgré les apparences et les prétentions, les droits de l’homme, l’égalité entre les citoyens, la justice ne sont encore que des slogans. Le silence, assourdissant, du gouvernement en témoigne.

Roula AZAR DOUGLAS

Even if I become a Female Lebanese Minister, my family members will still be considered as foreigners! Is this logic?

Do you think that women should have the same rights as men concerning the
nationality law? Do you think that lebanese women should be able to give
their sons and daughters the lebanese natonality ? If so please support
our campaign and sign this petition!

http://www.lwrnl.org/index.php?page=supporters&action=Register

"pourquoi j’écris" aux Éditions de la Revue Phénicienne
selon 50 auteurs libanais francophones






Avec les contributions de Guy Abela, Zeina Abirached, Mounir Abou Debs, Fifi Abou
Dib, Nassar Abou Khalil, Camille Aboussouan, Hoda Adib, Thérèse Aouad Basbous,
Jocelyne Awad, Georgine Ayoub, Roula Azar Douglas, Ritta Baddoura, Rita Bassil El
Ramy, Mona Bassil, Antoine Boulad, Carmen Boustani, Michel Cassir, Yasmine Char,
Georges G. Corm, Carole H. Dagher, Rudolf Daher, Zahida Darwiche Jabbour, Frida
Debbané, Gisèle Eid, Nabil El Azan, Michèle Gharios, Yasmine Ghata, Joëlle Giappesi,
Sobhi Habchi, Flavia R. Haddad, Mirna Hanna, Nada Heleiwa, Bélinda Ibrahim, Jamil
Jabre, Percy Kemp, Yasmine Khlat, Vénus Khoury Ghata, Elie Maakaroun, Georgia
Makhlouf, Robert Malek, Diane Mazloum, Alexandre Najjar, Fady Noun, Myra Prince,
Nohad Salameh, Salah Stétié, Alain Tasso, Yasmina Traboulsi, Ramy Zein, Sabah Zouein.

Bientôt une loi pour pénaliser la violence exercée contre la femme

L'Orient-Le Jour. Le lundi 25 mai 2009

* * *


« Chez nous, c'était le silence »

Dans son premier roman, Chez nous, c'était le silence, Roula Azar Douglas, journaliste libano-canadienne, rend hommage à la mémoire d'une amie, Ghada, victime de la violence conjugale... jusqu'à la mort.
« Au début, je croyais que le cas de Ghada était unique, mais en me documentant, j'ai constaté qu'il existe des points communs à toutes les histoires, explique Roula Douglas. Leur drame commence toujours lorsque le mari les isole et leur interdit tout contact avec le monde extérieur. »
C'est exactement le cas de Ghada qui, à 18 ans, s'est unie avec Pierre, de plusieurs années son aîné, mais qui a su la séduire. « Pierre a piqué sa première crise de violence durant la première grossesse de Ghada, poursuit Roula. Avant, il criait et s'énervait, et Ghada avait toujours pensé qu'elle était fautive et que c'était ses comportements qui l'agaçaient. » Elle a été alors voir son père pour lui demander de l'aider. Ce dernier a refusé, parce qu'il ne voulait pas de « scandales ».
« Lorsque j'ai écrit le livre, je voulais aider les femmes victimes de la violence, surtout conjugale, à se battre à fond pour obtenir leurs droits, tout comme mon amie », note Roula. Mais la vérité est tout autre. En effet, Ghada décède des suites d'un cancer du sein diagnostiqué à un stade avancé. « Pierre la maltraitait au point de ne plus l'aimer et de négliger sa santé, dit Roula. Lorsqu'elle a senti la masse dans son sein, elle l'a ignorée et ne s'est décidée à consulter un médecin que lorsqu'il était trop tard. »
« Souvent, les hommes violents sont charmeurs et charmants avec les autres, constate-t-elle, ce qui pousse les étrangers à blâmer la femme du comportement de son mari. C'est ce qui s'est passé avec Ghada, et c'est l'un des aspects dangereux de la violence conjugale. Il est important que les gens sachent que la femme n'est pas responsable de cette violence. J'estime qu'elle doit prendre son courage à deux mains et entamer une démarche pour se libérer de l'emprise de son agresseur. C'est le message que je voudrais faire parvenir à toutes les femmes victimes de violence. Il faut qu'elles soient conscientes qu'elles ne sont pas responsables de cette violence et que ce ne sont pas elles qui l'ont provoquée. »

http://www.resilience-psy.com ! Avril 2008

Chez nous, c'était le silence
"Rompre la loi du silence “Le bonheur est la plus grande des conquêtes, celle qu’on fait contre le destin qui nous est imposé” Albert Camus
Ghada, l’héroïne du premier roman de Roula Azar Douglas, a douloureusement échoué dans cette quête. Mariée à Pierre, deux enfants, elle va vivre une tragédie dont elle pourra difficilement se relever, celle de la violence conjugale. Roula Azar Douglas, dans son roman “Chez nous, c’était le silence“, s’inspire de l’histoire d’une amie libanaise pour dénoncer le calvaire quotidien que vivent certaines femmes au sein de leur couple. Harcelées, battues, humiliées, tétanisées par un mari agressif, violent, parfois pervers, elles vivent un enfer au quotidien, mais trop souvent elles ne disent rien, se résignent, acceptent leur sort. Pourquoi? pourquoi Ghada, malgré sa conscience, sa souffrance et l’exhortation de sa soeur, reste-t-elle aux côtés de cet homme violent et dominateur? Parce qu’elle a peur des représailles, peur pour ses enfants. Au Liban, le père a quasiment tous les droits sur les enfants, elle veut continuer à les élever comme dans une famille normale. Parce qu’elle est démunie, elle n’a pas de profession, elle est complètement dépendante de son mari économiquement. Parce qu’elle est fragilisée, inhibée par ce qu’elle vit tous les jours. Parce qu’elle est à bout de force: elle met toute son énergie à minimiser les tensions pour protéger ses enfants de la violence gratuite de son mari et de la violence aveugle de la guerre civile. Parce qu’elle a perdu toute confiance en elle, elle se sent même parfois coupable de ce qui lui arrive, elle a honte. Parce qu’elle veut respecter la promesse qu’elle a faite à son père de ne pas briser son foyer pour la réputation de la famille: c’est déshonorant dans une famille libanaise de quitter son mari. Pour toutes ces raisons elle ne peut pas partir, elle ne s’autorise pas à partir. Ainsi elle creuse son malheur et elle conforte son mari dans sa brutalité. Roula nous fait vivre par une écriture simple et délicate les douleurs, les tourments et les émotions de Ghada.
En mélangeant réalité et fiction, elle veut rompre la loi du silence sur ce problème social mais également donner aux femmes qui subissent cette violence conjugale la force de se battre contre leur destin d’épouses maltraitées. Objectif réussi ! Le livre est touchant et donne envie de vous le partager. Le lire, en parler c’est lever un peu le voile sur un problème trop souvent nié au Liban, comme dans d’autres pays d’ailleurs. La tradition et la religion régissent les règles familiales et empêchent l’institution d’un mariage et d’un divorce civils. Les hommes conservent une place dominante, l’honneur et la réputation de la famille sont trop souvent évoqués pour garder le silence. Les femmes sont donc démunies : où trouver un refuge ? Comment se séparer de son époux violent ? Comment faire valoir ses droits à la garde des enfants ? Comment garder sa maison ? Comment vivre et élever ses enfants ? Si la lutte contre la violence passe en partie par l’éducation, il faudrait avant tout que la loi enfin protège les victimes et permette de condamner et de sanctionner les hommes responsables de sévices. Mais les femmes concernées doivent trouver le courage de les dénoncer. Et ce n’est pas facile ! Vous pouvez trouver ce livre à Paris à l'Institut du monde Arabe : Chez nous, c'était le silence de Roula Azar Douglas