Lumières !

Que savent les étudiants de Ghassan Tuéni? Que savent-ils des (autres) grands intellectuels du pays du Cèdre? Peut-on généraliser? Sûrement pas. Mais force est de constater que la petite enquête journalistique, publiée il y a quelques jours par un quotidien arabophone auprès d’un certain nombre d’étudiants en journalisme, est inquiétante. «Qu’avez-vous appris, au fil de vos lectures ou au cours de votre scolarité, sur Ghassan Tuéni ? » a-t-on demandé à des journalistes en devenir.
Les réponses – peu satisfaisantes – de ces femmes et hommes du Liban de demain « ne reposent pas sur un fondement solide », rapporte le journal. Les étudiants – issus de la même filière – ont avancé différentes interprétations quant à leur manque de connaissances. « Le curriculum qui s’appuie uniquement sur des cours théoriques », « Le gouvernement qui ne s’intéresse pas aux grands intellectuels de leur vivant, attitude copiée par l’université », « Les étudiants qui ne lisent pas assez et qui ne cherchent pas à se cultiver » et même, selon un étudiant, « des divergences avec la pensée de Ghassan Tuéni, d’où l’absence des articles, textes et autres œuvres de ce grand journaliste ».
La faute du programme d’études, des jeunes eux-mêmes, de l’énorme quantité de savoirs à véhiculer aux étudiants, comme l’a suggéré un responsable universitaire ? Peu importe les causes, les conséquences de cette pauvreté de connaissances risquent d’être dévastatrices pour un peuple qui cherche encore son identité.

Peut-on compter uniquement sur les initiatives individuelles et les lectures personnelles des étudiants pour la transmission de l’héritage de nos grands penseurs aux futures générations et, en conséquence, pour la sauvegarde de notre patrimoine culturel? Ne doit-on pas intégrer dans les cursus les grands visages du pays du Cèdre, surtout ceux de grands intellectuels tels que Ghassan Tuéni qui fait l’unanimité de tous les Libanais?
Nous appelons le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur à introduire d’urgence les grands penseurs libanais, et à leur tête Ghassan Tuéni, dans les programmes scolaires et dans toutes les filières universitaires, à l’instar des cours de civilisation dans les universités américaines. Sinon, la vraie question qui s’impose serait: que restera-t-il du Liban demain? 

Making Waves, au-delà de la natation

Dans son nom, le clapotis de l’eau, l’écume des vagues, les rires des enfants. Car ce club étudiant concerne les enfants. Mais pas n’importe lesquels. Des filles et des garçons (de 3 à 17 ans) ayant des déficiences physique ou mentale. « Notre premier objectif est de permettre à ces enfants de connaître, comme tous les autres, un simple plaisir, celui d’être à l’aise dans l’eau et de nager », explique Farah Abi Mosleh, étudiante en agriculture à l’AUB. La jeune fille de dix-neuf ans est la présidente du club Making Waves Lebanon qu’elle a fondé il y a quelques mois, avec une poignée de jeunes, Sara Zeidan, Katia Maroushe et Roy Naoum Taoutel, tous étudiants à l’AUB. « Outre les cours personnels de natation, nous voulons donner à ces enfants une chance d’enrichir leurs aptitudes sociales et de se faire de nouveaux amis », poursuit Farah.
L’histoire a commencé l’été passé, lorsque Farah et ses camarades se sont engagés comme volontaires dans un camp d’été pour enfants déficients visuels, tenu à l’USJ. « Nous y avons rencontré Alia Jan, membre de Making Waves Canada, organisation étudiante fondée en 2004 par des étudiants de l’université McGill », précise Farah. De son contact avec les petits, la jeune étudiante raconte : « C’était la première fois que je m’occupais d’enfants ayant des besoins particuliers. Une expérience marquante. On découvre chez eux des capacités qu’on ne soupçonne même pas. » Farah se rappelle « la joie indescriptible » du jeune Mehdi (15 ans) lorsqu’il a sauté dans l’eau. « Nous étions tous dans la piscine à l’encourager. » Mehdi a appris à nager en quatre sessions. « Mais ce n’est pas toujours le cas. Il faut prendre le temps, rassurer l’enfant et parfois lui apprendre des choses basiques qu’il ne connaît pas », explique Farah. À la fin du camp, Alia propose aux jeunes étudiants de l’AUB de fonder une section de Making Waves dans leur université. C’est le début de l’aventure.

De gauche à droite : Omar Daouk, Sara Zaidan, Jad Abiad, Farah Abi Mosleh, Roy Taoutel et Katia Marroushe.

La naissance de Making Waves Lebanon est difficile. « Il fallait convaincre l’AUB de nous accorder l’autorisation de créer ce club à l’université, collecter des fonds, trouver une piscine », poursuit Farah, qui insiste sur le soutien de Mme Amal Yehya, directrice de l’école New Orient Academy. « Elle fut la première à nous aider. Nous apprécions énormément son appui », répète-elle. Pour le financement de leur club, les jeunes étudiants participent à des événements tenus à l’AUB et organisent une soirée karaoké dans un restaurant à Hamra. « C’était très réussi. 110 personnes ont répondu à l’appel. On ne s’attendait pas à un tel succès. »
Aujourd’hui, les fonds sont là. Les jeunes vont pouvoir louer la piscine qu’ils ont « trouvée » dans un gym à Koraytem. En attendant de commencer les séances de natation avec les enfants, Farah, Sara, Katia et Roy sont plus motivés que jamais. Farah conclut : « Nous espérons qu’en 2013, Making Waves s’étendra à plusieurs universités libanaises et que cette association deviendra une vraie ONG. Les enfants ayant des besoins particuliers ont de grands potentiels. Il faut leur donner les moyens de les développer. »