Krystel Saneh, jambes en or et volonté de fer

En 2011, lors de la première édition du championnat de l’Asie de l’Ouest en athlétisme pour les cadets, Krystel remporte trois médailles d’or.
Posée, intelligente, dynamique, Krystel Saneh a la tête sur les épaules. Ses rêves, elle est déterminée à «faire le nécessaire pour les réaliser ». La brillante athlète, étudiante en première année de publicité à l’Académie libanaise des beaux-arts (ALBA), sait de quoi elle parle. Aux Jeux ouest-asiatiques 2012 tenus à Dubaï au mois de décembre, elle remporte trois médailles dont une d’or. Mais aujourd’hui, c’est de ses études qu’elle commence à parler. «Je suis contente de la filière que j’ai choisie. La publicité est un domaine dans lequel je me vois évoluer. Surtout que c’est conciliable avec le sport. » La jeune fille de dix-huit ans consacre deux heures et demie par jour, six fois la semaine, aux entraînements. « Pas d’impact sur mon travail à l’université, tout est affaire d’organisation », assure-t-elle en confiant qu’elle apprécie beaucoup la compréhension de l’ALBA qui l’autorise à s’absenter lorsqu’elle a des compétitions à l’étranger. « J’aime beaucoup l’ambiance dans les cours et la complicité avec mes camarades. Nous sommes tous sur la même longueur d’onde. Par ailleurs, nous avons d’excellents profs qui se donnent à fond », poursuit-elle. 

Un don découvert très tôt
Sa passion pour le sport remonte à loin. « J’étais en classe de 10e au Collège de Champville où j’ai effectué toute ma scolarité. C’est Arda Kalpaklian, la première athlète libanaise et arménienne à participer à des Jeux olympiques, qui m’a découverte. Je me rappelle avoir réalisé un saut en longueur de 1,90 m. J’avais 7 ans », précise Krystel. Encouragée par sa professeure d’éducation physique, elle commence à pratiquer le basket-ball. Un sport auquel elle s’adonne pendant quelques années avant de se consacrer à l’athlétisme.
Passionnée par cette discipline, l’adolescente se met à faire des recherches sur les grands athlètes mondiaux et à suivre leurs nouvelles. «J’étais à ce moment-là en classe de 6e. » Et c’est alors qu’elle commence à s’entraîner sérieusement avec Élie Saadé, qui deviendra son coach et son mentor. «Sans lui, je n’aurai pas pu arriver à ce niveau. C’est très important que le coach comprenne l’athlète. »
Des difficultés dans son parcours ? Krystel sourit : «Le manque de soutien matériel de la part du gouvernement, et cela malgré le support moral offert », souligne-t-elle.
Son prochain objectif : les Jeux olympiques 2016. « Je ferai le nécessaire pour y arriver », répète l’athlète avant d’ajouter : « Le sport m’a appris à bien m’organiser, m’a permis de développer des habiletés relationnelles, et m’a aidée à devenir mature. »

Échanges interculturels au fond du désert


« Connecting cultures », initiative de l’ONG internationale Outward Bound, organise, depuis 2004 et avec le soutien de l’Unesco, des expéditions dans les déserts d’Oman pour des jeunes de 17 à 24 ans « appelés à devenir les dirigeants de la société de demain ». L’objectif de ces randonnées intensives : favoriser la rencontre des cultures et promouvoir la compréhension mutuelle et la paix dans le monde, en rassemblant durant cinq jours, dans un environnement naturel, sans Internet ni couverture réseau, des jeunes de différents pays de l’Occident et du monde arabe.
John Achkar, licencié en économie de l’USJ et étudiant au master en relations internationales, a représenté le Liban lors de la dernière expédition qui a eu lieu au mois de décembre. « Parler au nom de mon pays est un honneur pour moi », lance le jeune homme de 22 ans, fier « d’avoir porté le drapeau libanais » devant des participants (17 au total) d’une quinzaine de pays arabes et européens : Oman, Arabie saoudite, Maroc, Irak, Yémen, Égypte, Slovénie, Pologne, Grande-Bretagne, Croatie, Finlande, Allemagne, Andorre, Espagne et Hollande.


« Avant de m’envoler pour Oman, j’ai entendu un prêtre déclarer que pour avoir un vrai contact avec une personne et découvrir son fond, il faut s’imaginer dans le désert, sans Internet ni téléphone, et voir uniquement l’autre en face de soi. L’expédition, c’était justement cela », affirme John. 
Une fois arrivés à Oman, les jeunes participants, de différentes origines et d’horizons divers, sont allés au désert en autocar, « un trajet de trois heures », précise John, qui poursuit : « Nous avons commencé notre marche dans le désert, le 7 décembre vers 13h, accompagnés de trois chameaux, sous un soleil de plomb ! » Le jeune étudiant qui effectue actuellement une année d’échange à Sciences Po (Paris) se réjouit de la bonne communication qui s’est rapidement établie entre les jeunes participants. « Je n’imaginais pas cela. Nous en sommes arrivés à discuter de n’importe quel sujet, à sortir des préjugés, à trouver des points communs. » 

Aller vers l’autre
Les journées étaient structurées autour de la marche (12 km par jour) et de débats quotidiens. Les discussions, animées par Marc Evans, le fondateur de « Connecting cultures », portaient sur des thèmes tels que les acteurs de changement, les préjugés et le rôle des médias. « Et en soirée, passé 20h, après avoir poursuivi officieusement le débat, nous dansions la dabké, chantions autour du feu de camp et jouions à différents jeux... J’ai appris par exemple qu’en Europe, le jeu du téléphone cassé est appelé téléphone arabe... » ajoute John.
Le jeune homme, qui tient à « remercier l’USJ, le bureau du délégué du recteur à la vie étudiante et aux engagements citoyens et la Commission nationale libanaise pour l’Unesco », déclare : « Même si le soleil brûlait fort, traverser le désert n’est pas uniquement une épreuve physique. C’est surtout une expérience psychologique. Les moments passés seuls face au néant constituent une expérience inoubliable. Avoir soif, faim, un peu froid la nuit, faire face à des tempêtes de sable, voir des mirages, parler aux Bédouins et ne rien comprendre de leur langage, chanter tout seul, découvrir cet animal magnifique qu’est le chameau... » 
Mais le plus édifiant de ce bain interculturel est le contact avec les autres participants. « Ce qui m’a marqué le plus, ce sont les débats engagés avec les jeunes des pays arabes, en majorité musulmans. Des discussions de fond sur la religion et les croyances », confie John qui dénonce le confessionnalisme au Liban, « depuis toujours l’instrument utilisé par les envahisseurs ». L’importance de ces discussions pour le jeune homme relève du fait qu’elles permettent de trouver des points de convergence. « Je ne savais pas qu’il y avait autant de points communs entre les jeunes. Des points sur lesquels nous pourrons à l’avenir construire de meilleures politiques de cohésion, un espace Schengen arabe, pourquoi pas ? » se demande, confiant, John.

La culture du dialogue
« Chez nous, il y a absence de dialogue. La grande majorité des Libanais ne sont pas sortis de leurs communautés respectives durant toute leur vie. Comment un échange pourrait-il alors avoir lieu ? Il faut dépasser la confession et les partis confessionnels. Je sais que c’est facile à dire et difficile à mettre en place. Pourtant il faut être conscient que les choses bougent déjà... et dans le bon sens. Les jeunes désireux de briser le système de “castes” confessionnelles sont de plus en plus nombreux. Ils en ont assez d’entendre leurs parents affirmer que tel leader est bon pour les chrétiens ou tel autre pour les musulmans », conclut John.