« I leaf art », pour l’amour de l’art, par amour de l’autre

Élie, Roula, William, Solange et Mostapha.
C’est une histoire de couleurs, de magie, de sourires générés. Elle aurait pu être une histoire de Noël. Roula Farès a 25 ans. Enseignante d’anglais dans une école élémentaire de l’Unrwa à Bourj al-Barajné, elle y mène des activités de sensibilisation auprès de jeunes garçons de 10 à 12 ans. « La salle où nous nous réunissons était dans un état lamentable. Un jour, j’ai décidé que j’en avais assez de voir les enfants évoluer dans ce milieu triste et sombre », raconte-elle. C’est alors que la jeune diplômée en gestion de l’éducation de l’Université internationale libanaise (LIU) a l’idée de contacter son amie Solange el-Heybe, jeune psychologue clinicienne, spécialisée en modération de groupes de thérapie à travers l’art, pour lui demander si elle connaissait quelqu’un capable de rénover la salle. Et début novembre, en quelques rencontres au hasard des chemins, « I leaf art » se forme. Solange, Roula, Élie, William et Moustapha, cinq jeunes de formations et d’intérêts différents, tous passionnés d’art, réunis autour d’un même objectif : embellir et améliorer les lieux de vie des plus démunis.Élie Assi a vingt ans. Diplômé en décoration d’intérieur, porté sur la photographie, il étudie actuellement la réalisation de films à l’Université des arts, sciences et technologies du Liban à Kaslik (AUL). « À travers l’embellissement de la salle, nous avons voulu contribuer au bien-être des enfants qui fréquentent cet endroit », explique-t-il. William Kachamy, quant à lui, n’a que dix-sept ans mais déjà une grande détermination. Après une première formation à l’imprimerie à al-Kafaat, ce jeune graffiteur (connu sous le nom de Willy Williams) qui rêve de dessiner un graffiti géant sur toute une façade d’immeuble, ambitionne d’étudier la décoration. « Je suis passionné de dessins et d’art. “ I leaf art ” me permet de partager cette passion pour embellir des lieux tristes », confie-t-il. Mostapha Berro, 24 ans, diplômé en business de l’Université internationale libanaise (LIU), est le cinquième membre du groupe. « Mostapha nous a préparé une surprise en offrant à chacun du groupe un gilet avec le nom “I Leaf art” imprimé dessus », raconte Solange. 
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Premier défi relevé
À l’école de l’Unrwa à Bourj al-Barajné, le budget alloué aux travaux d’embellissement de la salle est modeste. « Les élèves ont payé chacun la modique somme de 500 piastres comme contribution symbolique aux frais. Cela leur a permis de se sentir impliqués dans ce projet qui les concerne », assure Solange. Avec moins de 200 $, Solange, Roula, Élie, William et Mostapha ont réussi à créer pour les enfants une salle plus accueillante, plus jolie, plus chaleureuse. « Nous avons tenu à intégrer dans le dessin mural, des éléments de l’environnement des enfants, mais métamorphosés et embellis, tels les poteaux d’électricité et les lignes électriques sur lesquelles nous avons dessiné des notes de musique », poursuit Solange.
« Malgré la difficulté qu’ils rencontrent à extérioriser leurs sentiments, les enfants ont manifesté leur bonheur de retrouver leur salle embellie, rajeunie, vibrante de couleurs et équipée de rideaux », raconte Roula. Une expérience gratifiante que les membres de « I Leaf art » ont hâte de répéter à travers le Liban. Ce qui ne devrait pas tarder puisqu’ils ont déjà reçu plusieurs demandes pour janvier.
« I Leaf art », une excellente initiative, une belle promesse. Pour en savoir plus, visitez le www.facebook.com/pages/I-LeafArt/129098307249079 ? fref=ts.

Handicap : les photographies qui brisent les préjugés

Photo Ghina Fleyfel
Des sourires. Des accolades. De la tendresse. Du bonheur. C’est ce que montrent les photographies accrochées depuis le mercredi 12 décembre aux murs de la salle d’exposition de l’Institut français du Liban. Des clichés sur le thème du handicap – vivants et esthétiques – réalisés par des étudiants en photographie de l’ALBA qui, sous la supervision du photographe Samer Mohdad, ont réussi à capturer des regards, des gestes et des émotions, sans voyeurisme déplacé, et à fixer sur pellicule des moments et des scènes de la vie d’enfants de Sesobel. On y voit des filles et des garçons – atteints de handicaps physiques ou mentaux – en train de jouer, de danser, de faire de la peinture, de nager, de manger. On y voit des regards échangés, des mains qui se touchent, des plaisirs partagés. Et beaucoup de douceur. Un remarquable travail artistique et humain, effectué par des étudiants dont « l’implication a été au-delà du travail scolaire », aux dires d’Alain Brenas, responsable du département arts graphiques et publicité à l’ALBA.

Une expo et un livre
« Le contact avec ces enfants m’a beaucoup touché », raconte Georges Abi Aad. Le jeune homme de 22 ans trouve que cette exposition, qui s’inscrit dans le cadre du 35e anniversaire de Sesobel, montre l’handicap d’une autre façon. Ghina Fleyfel, 24 ans, étudiante en 5e année de photographie, n’avait jamais rencontré de personnes vivant avec un handicap. La petite appréhension qui a précédé sa première visite à l’association s’est vite dissipée, remplacée par le plaisir de découvrir « l’incroyable énergie positive » qui émane des enfants. Jad Safar, quant à lui, estime qu’outre un bienfait sur le plan personnel, cette expérience lui a permis « d’apprendre beaucoup sur l’aspect technique de la photographie ».
Parallèlement à l’exposition, Sesobel publie 7 jours parmi les anges. Un livre touchant – préfacé par Salah Stétié – dans lequel David Hury, écrivain et journaliste, raconte dans un style vivant et imagé l’histoire de Sesobel. « Il m’était impossible de me limiter à une vision institutionnelle et formelle. Il me fallait raconter une histoire. Celle des trente-cinq dernières années, par petites touches, mais surtout celle de tous (ces) personnages, en les rendant vivants, en les faisant parler, en les faisant évoluer dans leur cadre de vie, comme les personnages d’un roman en cours d’écriture », écrit l’auteur dans son avant-propos.
536 enfants de toutes les régions du Liban sont actuellement pris en charge par Sesobel qui, depuis 1977, s’occupe des enfants atteints de handicaps, physiques et mentaux, soutient leurs familles et travaille à améliorer la perception qu’a la société du handicap.
L’exposition se poursuivra à l’Institut français, rue de Damas à Beyrouth, jusqu’au 5 janvier. 

Au CPM, on construit la paix jour après jour

La nouvelle promotion de médiateurs formés par le CPM
à Beyrouth et Tripoli.
Une altercation entre étudiants qui tourne mal. Un différend de voisinage qui dégénère en violence. Un désaccord familial qui dérape en conflit permanent. Des situations non rares qui auraient pu être évitées ou du moins mieux gérées par le biais de la médiation. « Le but de toute médiation est d’amener les personnes en conflit à se comprendre, à renouer une communication et à trouver une solution qui satisfasse les deux parties », explique Johanna Hawari-Bourgély, avocate, médiatrice, formatrice, fondatrice et directrice du Centre professionnel de médiation de l’USJ (CPM).
Le CPM, créé en 2006, reçoit deux demandes de médiation par semaine à Beyrouth et une à Tripoli. « Nous avons 70 médiateurs actifs. Des hommes et des femmes qui proviennent de tous les horizons culturels et professionnels », précise la directrice du CPM. Des avocats, des médecins, des chefs d’entreprise, des banquiers, des ingénieurs, des magistrats, des infirmiers... Formés à la médiation, leur rôle est d’aider les citoyens à résoudre leurs différends par la voie de la compréhension, de l’écoute et du dialogue.

Devenir médiateur professionnel
C’est son « intérêt pour la résolution des conflits » qui a poussé Mohammad Mansour, 28 ans, volontaire à la Croix-Rouge et activement engagé dans le travail social, à suivre une formation au CPM pour devenir médiateur professionnel. Les cours théoriques, les exercices pratiques et les mises en situation lui ont été « très bénéfiques, ne serait-ce qu’au niveau personnel, dans la vie de tous les jours », affirme le jeune médiateur. Éliane Bou Khalil, responsable de formation au CPM, acquiesce. La médiatrice, qui compte dans son bagage académique un master euro-libanais en médiation interculturelle, confirme : « Effectivement, le changement apporté par la formation au niveau personnel est important. On apprend à écouter l’autre. On acquiert une plus grande ouverture, une souplesse et les outils pour gérer efficacement les tensions. »
Plus de 200 Libanais et Libanaises ont, eux aussi, fait le choix de se former à la médiation professionnelle au CPM. La formation d’une durée d’environ huit mois est validée par un diplôme de médiateur délivré conjointement par le CPM de l’USJ, l’Institut de formation à la médiation et à la négociation de l’Institut catholique de Paris et l’Association des médiateurs européens.
Par ailleurs, le CPM propose, à Beyrouth et/ou à Tripoli, des séminaires d’initiation à la médiation et à la communication non violente. « L’objectif de ces séminaires est de permettre aux participants d’acquérir des outils et des techniques pour améliorer leur communication et gérer les situations conflictuelles personnelles », indique Mme Hawari-Bourgély. Le coût de la formation, d’une durée de 4h30, est de 110 000 LL.
Outre la formation, le CPM œuvre sérieusement pour promouvoir la médiation, qu’elle soit conventionnelle, judiciaire ou administrative. Membre de l’Association des ombudsmans de la Méditerranée, le centre cherche à promouvoir la création d’un médiateur de la République au Liban.

Former des étudiants-médiateurs
« Nous débutons la semaine prochaine à l’USJ une formation d’étudiants-médiateurs. Elle sera validée par une attestation. Ces universitaires seront compétents pour résoudre, au sein de leur campus, des conflits entre étudiants. Ils seront encadrés par des médiateurs seniors du CPM », annonce Mme Hawari-Bourgély. Le CPM a déjà mené à bien nombre de projets tels que la formation d’élèves-médiateurs au Collège des Saints-Cœurs (Sioufi) et à l’école Notre-Dame de Nazareth, et des formations à la communication non violente et à la médiation auprès des détenus des prisons de Roumieh et de Barbar Khazen. « Les détenus ont eu l’opportunité de vider leurs frustrations et leurs angoisses, et d’éviter ainsi de faire des transferts sur les autres détenus avec des passages violents à l’acte », souligne Mme Hawari-Bourgély.
Jean-Louis Keyrouz, élève au Collège des Saint-Cœurs (Sioufi), confie : « Avant de devenir médiateur, je croyais que dans les conflits de la vie, il y avait toujours un perdant et un gagnant. Maintenant, je réalise qu’on ne gagne rien en se disputant avec les autres. J’ai appris à comprendre leurs sentiments, la raison qui les pousse à agir et à réagir de telle ou telle autre façon. J’ai également appris à trouver avec eux les points communs et les terrains d’entente. »

www.cpm.usj.edu.lb

La fille qui ressuscite des œuvres d’art

Mélina, dans son atelier à Mar Takla.
Mélina Moussalli n’est pas uniquement jeune et charmante. Elle est aussi, et avant tout, intelligente, déterminée et passionnée. Et c’est de sa passion : l’art, ou plus précisément de son métier : la conservation et la restauration d’œuvres et d’objets d’art, qu’elle  m'a parlé en toute spontanéité. « Ce qui m’a poussée à m’aventurer dans ce domaine, c’est ma passion pour les métiers d’art et l’importance que revêt pour moi le fait de conserver ce qui était et de préserver l’intégrité non seulement des artistes originaux, mais aussi de l’art lui-même. »
Animée, pour l’art, d’un amour pérenne qui remonte à son enfance – sa mère est artiste –, Mélina intègre l’AUB pour poursuivre une licence en histoire de l’art et des beaux-arts. Mais sa formation pratique, c’est à l’atelier de restauration de Marion Boyer à Paris qu’elle l’effectue. « Le stage d’un an m’a donné l’occasion de travailler sur tout genre d’œuvres d’art provenant de chez Drouot, Christies... et en particulier sur des tableaux tibétains du musée Guimet de France », précise la jeune artiste de 25 ans qui avait complété préalablement des études de trois ans en restauration de tableaux et de céramiques aux Paris-Ateliers, en France. 

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Aujourd’hui, Mélina passe le plus clair de son temps dans son atelier – lumineux et calme – qu’elle a courageusement aménagé en octobre 2011, dans un quartier paisible de Mar Takla. « Pour moi, restaurer des tableaux et des objets en céramique n’est pas seulement un métier, c’est également un loisir », confie-t-elle. Parmi les multiples tâches professionnelles dont elle s’acquitte avec soin, nettoyer des tableaux lui procure un plaisir évident. « C’est merveilleux ! C’est toujours une découverte. On voit le tableau changer et se métamorphoser sous nos yeux », s’enthousiasme-t-elle d’une voix douce, presque timide, malgré l’ardeur qui s’en dégage. « Permettre au tableau de respirer », « redonner vie », « protéger », des expressions qui reviennent souvent dans sa bouche. « Pour moi, un tableau, c’est vivant », confirme-t-elle.
Les débuts sont-ils difficiles dans ce domaine ? « Les gens ont peur de confier leurs œuvres à des personnes qu’ils ne connaissent pas encore », admet-elle. Pour se faire connaître, elle visite des galeries, des antiquaires et distribue des brochures. « Petit à petit, les gens sont venus. Ils ont vu mon travail et se sont sentis plus confiants », raconte la jeune artiste qui, parallèlement à son métier, cherche à transmettre sa passion pour l’art en donnant des cours de peinture dans son atelier.
Mélina participe à l’exposition Afkart, prévue du 14 au 20 décembre au BIEL. Elle conclut : « Les œuvres d’art, comme les êtres vivants, ont besoin de soins. Il ne faut pas les laisser mourir. »
www.melinamoussalli.com