Poems for those who still read (Des poèmes pour ceux qui lisent encore) est le titre de son recueil en devenir. Un ouvrage rassemblant ses écrits en français, anglais et arabe, composés durant un exil auto-imposé de plus de sept ans qui l'avait mené à l'âge de 22 ans de Tripoli à Paris, en passant par Londres, Berlin, l'Inde, Washington et New York. Des poèmes qui relatent « sa destinée et celle de sa nation ». Dima el-Sayed, auteure, chanteuse et peintre, confie : « J'ai toujours eu envie de partir. Le Liban n'est pas un exemple de liberté. » Dans la capitale française, Dima, fraîchement licenciée en droit de l'USJ, intègre la Sorbonne et complète un DEA en droit comparé. « J'avais, de par mes lectures et mes études, des attentes de l'étranger qui n'ont pas été comblées », poursuit-elle, faisant allusion à la censure de son blog sur Le Monde.fr durant la guerre de juillet 2006.
Avant son retour au pays du Cèdre il y a deux ans, elle part en Inde pour apprendre le chant dhrupad, considéré comme étant l'expression musicale la plus ancienne de l'Inde du Nord. Une expérience édifiante et révélatrice pour la jeune chanteuse.
Le crowdfunding pour trouver des réponses
« La société libanaise qui appelle sans cesse les émigrés à revenir au pays, quelle place accorde-t-elle à l'étranger libanais ? Quel espace lui donne-t-elle ? » s'interroge la jeune artiste. Et c'est pour trouver une réponse à ses interrogations qu'elle a choisi le crowdfunding – financement participatif par le biais d'Internet et des réseaux sociaux – pour concrétiser son projet littéraire. « Je veux impliquer les lecteurs potentiels dans la création de cet ouvrage, les faire sortir de leur rôle de simple récepteurs en les faisant participer au processus de création du livre en tant qu'objet », explique-t-elle. La campagne lancée sur le site Zoomaal est ouverte jusqu'au 3 mars prochain. « Cette campagne de financement est un caillou jeté dans l'eau. Quel sera son effet ? C'est ce que je veux mesurer », poursuit Dima, avant d'ajouter : « Je suis en même temps celle qui lance la pierre et la pierre elle-même. »
Le financement participatif permettra également de « remettre en question le rapport de l'individu – libanais, arabe ou autre – à l'argent ». Dima poursuit : « Est-on prêt à troquer son argent pour des vers ? Cette question est particulièrement pertinente dans les sociétés prétendument religieuses. »
De l'esthétique
Dima, qui fut l'un des 25 musiciens sélectionnés du monde entier pour effectuer en 2013 une résidence de quatre semaines aux États-Unis axée sur le pouvoir transformateur des arts à travers la création de l'original, la musique inventive et la « diplomatie de personne à personne », travaille sur un prochain projet artistique, en collaboration avec des artistes libanais et internationaux, une exposition sonore mixte de toiles, de chants et de projections qui s'articule autour du sacré.
À plus court terme, qu'offre-t-elle aux lecteurs dans son prochain recueil de poèmes ? L'artiste répond : « De l'esthétique. La poésie propose une harmonie, une paix. Notre vie est faite de mots qu'on entend consciemment ou pas, qui nous façonnent : discours des politiques, des figures religieuses, des autorités parentales, avec incitations à la haine, à la violence. Une culture du laid qui nous pousse vers le néant. »

Deux Libanais veulent contribuer à personnaliser le traitement du cancer au Liban


Le Dr Nemr el-Hajj
Ils sont frère et sœur. Lui effectue un postdoctorat au département génie mécanique de l'Université de technologie de Compiègne. Elle est enseignante-chercheuse à l'UL, l'USEK et l'UPA. Leur ambition ? À long terme, « révolutionner les diagnostics et les traitements par la caractérisation de la constitution génétique d'un individu, cibler le traitement médicamenteux sur la région à traiter, offrir des appareils adaptés aux handicaps visuels et auditifs, et fabriquer des capteurs intégrés pour détecter les maladies corporelles dès leur apparition ».
Mariana Hajj, docteure en pharmacologie moléculaire, explique : « Le marché mondial de l'instrumentation médicale pour les rayons X est en croissance constante depuis plusieurs années. Les nouveaux générateurs de rayons X seront basés sur une thérapie reconnue et utilisée couramment par la communauté médicale. L'innovation réside dans la miniaturisation de ces générateurs en utilisant des cathodes froides à base de nanoperles de carbone. » Une nouvelle technologie qui vise en premier à améliorer la qualité des soins apportés aux patients atteints du cancer. « La radiothérapie conventionnelle brûle non seulement les cellules cancéreuses, mais aussi les tissus qui les entourent. Ce n'est pas le cas avec les nanoperles de carbone qui permettent d'avoir une cathode froide et d'effectuer une radiothérapie de précision. Et grâce à la miniaturisation de l'appareil, le patient pourra à l'avenir subir sa radiothérapie à domicile. »
Un traitement encore peu accessible
« Actuellement, ce traitement est offert dans moins d'une dizaine de centres au Japon, en Chine, en Europe. En France, un projet de centre médical qui dispensera la nouvelle technique de radiothérapie est en cours », affirme le Dr Nemr el-Hajj. Une radiothérapie plus précise et plus sûre, mais qui est encore loin d'être accessible à tous les malades. « Limitée pour l'instant aux patients ayant des tumeurs radiorésistantes, elle est offerte uniquement dans quelques centres de traitement et est très coûteuse. »
L'ambition des deux chercheurs de faire participer le Liban au développement de cette nouvelle technologie est née il y a cinq mois, lorsqu'ils ont appris qu'une entreprise établie au Canada a réussi, après une dizaine d'années de recherche et de développement, à passer à la phase de production industrielle de nanoperles de carbone. « NanoMed, qui compte dans ses rangs des chercheurs internationaux, a développé un réacteur pour la production massive en continu des nanoperles de carbone qui pourraient ainsi être utilisés comme renfort dans des matrices polymères pour le développement de nanocomposites aux propriétés spécifiques remarquables », explique le Dr Nemr el-Hajj, qui propose alors au chef de direction de NanoMed, Joseph Khoury, de travailler avec les chercheurs de l'entreprise sur le développement des nouveaux nanocomposites.


Possibilités multiples
« Les nanoperles de carbone peuvent être utilisées comme un renforcement des différentes résines thermoplastiques et thermodurcissables pour différentes applications. Par exemple, elles semblent être un atout pour la fabrication des gilets pare-balles », poursuit le Dr Hajj, qui avait obtenu une mention très honorable pour sa thèse de doctorat en génie mécanique et génie des procédés, soutenue en 2010 à l'Université de Picardie Jules-Verne. Aujourd'hui, en tant qu'expert des nanocomposites, il dirigera un projet de recherche mené en collaboration entre l'Université de technologie de Compiègne et NanoMed, et contribuera à la phase de développement des nanocomposites pour des applications dans les secteurs de l'aéronautique et de l'automobile.
Pour le Dr Mariana Hajj, devenue depuis peu conseillère scientifique de NanoMed au Liban, le moment marquant de ces derniers mois est l'instant où elle a appris que NanoMed a fabriqué un prototype de générateur de rayons X miniature et portable. « J'ai alors trouvé qu'il serait très intéressant pour moi de participer aux recherches concernant l'expérimentation sur les souris et les essais cliniques, d'une part, et d'amener les générateurs miniaturisés au Liban, d'autre part », confie-t-elle, avant d'affirmer avec enthousiasme : « Cette personnalisation du traitement du cancer révolutionnera la médecine au Liban et dans le monde. Ces appareils permettront aux médecins traitants d'effectuer la radiothérapie chez les patients, dans le confort de leur domicile. Et le coût du traitement sera significativement inférieur au coût actuel. »
Les chercheurs libanais souhaitent également donner la possibilité aux étudiants et à leurs collègues au pays du Cèdre de participer à la phase d'industrialisation de ces générateurs.
Leurs projets sont-ils faciles à réaliser ? « En ce qui concerne l'implantation au Liban, nous allons étudier les détails bientôt. Cependant, la gestion administrative est complexe. Au niveau universitaire, nous n'avons pas les fonds nécessaires pour envoyer des étudiants et des chercheurs au Canada. »
« Les nanoperles de carbone n'ont pas encore livré tous leurs secrets. Elles méritent un travail de recherche, de caractérisation et d'amélioration plus approfondi. C'est pourquoi plusieurs universités et instituts de recherche et de développement s'y intéressent ». Et le Dr Mariana Hajj de s'interroger : « Pourquoi pas les universités libanaises? Pourquoi pas l'industrie libanaise ? »


                                           Le Dr Mariana Hajj à l’Université Montpellier I, 
                                           en 2012, lors de sa soutenance de thèse 
                                           pour laquelle elle a obtenu une mention 
                                           très honorable et les félicitations du jury.