L'article de Bélinda Brahim sur mon nouveau roman dans l'Agenda culturel

Le jour où le soleil ne s’est pas levé le roman de Roula Azar Douglas qui aborde le thème de la fragilité de la vie

Le jour où le soleil ne s'est pas levé est un roman attachant, empli de tendresse et d'espoir, dans lequel l’auteure donne à voir la fragilité, mais également la force de l'être humain, ses doutes, sa peur de perdre ceux qu'il aime, son attitude face à la mort, à l'absence et au silence. Elle y évoque aussi, mais sans s'y attarder, les blessures invisibles que la guerre inflige à ceux qui la vivent et le poids des non-dits sur les relations humaines… Entre Achrafieh, Mon-tréal et Québec, sur fond de prosopopée, l'auteure nous fait découvrir Noura, jeune peintre libano-canadienne, des bribes de son enfance au Liban et son regard sur la vie, la perte d'êtres chers et l'espoir… Dans son roman, Roula Azar Douglas aborde les grands thèmes de la vie avec simplicité et délicatesse et met en relief la capacité à la fois humaine et surhmaine à surmonter les malheurs. Avec son écriture sobre et claire, elle réussit à faire vibrer le lecteur au rythme des émotions qu'elle décrit. 

Roula Azar Douglas donne rendez-vous à ses lecteurs et lectrices pour une ren-contre/dédicace de son roman le dimanche 11 novembre, à partir de 18h au Salon du Livre francophone de Beyrouth, sur le stand de Noir Blanc Et Caetera. Entretien.
Quand avez-vous commencé à rédiger ce roman et sur quelle inspiration ?L'idée de ce roman m'a effleuré l'esprit il y a quelques années. Elle est née de ma peur de perdre un être cher. Je ne l'ai pas couchée sur papier. J'étais dans l'incapacité d'écrire à cette époque. L'histoire est longtemps restée en gestation. Puis au printemps dernier, je me suis trouvée témoin d'une vie qui s'achève. Une expérience douloureuse, mais édifiante. Un déclic pour l'écriture de ce roman. Trois mois plus tard, au bout de quelque 130 pages, j'ai mis le point final de mon manuscrit.

Y a-t-il des éléments autobiographiques à retenir en particulier ?Le roman comprend de courtes intrusions autobiographiques et des allusions à des situations, des impressions, des émotions vécues. Il y a quelques fragments de mon enfance, des instantanés de ma vie. J'y ai également introduit des bribes de personnes réelles que je connais ou que j'ai croi-sées.

Le destin de votre héroïne va basculer à un moment où elle était à l’apogée de son bonheur dans sa vie de couple. Pourquoi avoir choisi de virer vers le drame à ce moment-là ?Le drame aurait pu survenir à n'importe quel autre moment. Je l'ai voulu à cet instant précis moins pour montrer que le bonheur est éphémère que pour accentuer l'impression de choc que l'on ressent lorsqu'une tragédie s'abat sans crier gare et que l'on se rend compte de l'importance des choses qui comptent vraiment et que l'on a sous-estimées. 

Que pensez-vous de l’aide médicale à mourir ?J'estime que toute personne en fin de vie, peu importe sa situation familiale, sociale ou écono-mique, a droit à l'information, à des soins palliatifs de qualité, à un accompagnement humain jus-qu'au seuil de sa vie. Elle a le droit de ne pas souffrir, d'avoir son mot à dire et d'être écoutée quant à la poursuite du traitement ou non, si sa maladie est incurable et si la situation est irréversible. 

Le jour où le soleil ne s'est pas levé dans Libnanews

Le jour où le soleil ne s’est pas levé, nouveau roman de Roula Azar Douglas. 


Ce roman est une surprise pour ceux qui vous suivent. Vous semblez tellement prise par l’enseignement, le journalisme, votre lutte pour l’égalité des sexes.  Où avez-vous trouvé le temps d’écrire ? Bonne question. L’idée m’a effleuré l’esprit il y a quelques années lorsque je me suis trouvée face à face avec la peur de perdre quelqu’un qui m’est très précieux. Je l’ai caressée un moment. Mais j’étais dans l’incapacité d’imaginer, de créer, d’écrire. Il a fallu dompter la peur en premier puis attendre que la tempête se calme. Au mois de mars dernier, j’ai pris la décision de venir à bout de ce projet. J’ai contacté mon éditrice. Et je me suis lancée dans l’écriture. Avec un horaire très chargé, de nombreuses responsabilités professionnelles et familiales, ce n’était pas une promenade.  Mais voilà, le défi est relevé. Je signe le roman au Salon du livre francophone de Beyrouth au Biel le 11 novembre à 18h30.                                                                                                                

Pouvez-vous nous donner un aperçu de l’histoire que vous racontez ? Je serai très concise et brève pour ne pas trop dévoiler. Il s’agit d’un couple. Elle a vingt-huit ans.  Elle est artiste peintre. Il est journaliste, de quelques années son aîné. Ils vivent à Mont-Royal, un charmant quartier à Montréal. La vie semble leur sourire. Sauf que le 16 janvier 2008, au détour d’une rue, tout bascule. Ce n’est pas une histoire d’amour. C’est une histoire de vie. Une histoire à laquelle nous risquons tous d’être un jour confrontés. Partiellement au moins. Votre premier roman parle de la violence conjugale. 


Quels sont les thèmes que vous abordez dans cet ouvrage ? Je ne veux pas induire le lecteur en erreur. Ce n’est pas un essai. C’est un roman. Un récit dans lequel je donne à voir la fragilité mais également la force de l’être humain, ses doutes, sa peur de perdre ceux qu’il aime, son attitude face à la mort, à l’absence et au silence. J’évoque également mais sans m’y attarder les blessures non visibles que la guerre peut infliger à ceux qui la vivent ainsi que les traumatisme psychiques chez les reporters de guerre… 

Quelle est la part de la réalité dans ce que vous écrivez ? La réalité est là, bien présente. Si Noura et Danny n’ont jamais existé. Leurs traits, leurs caractères, leurs idées sont vrais. Des parties de leur histoire sont bien réelles. Par ailleurs, Noura et moi  partageons beaucoup de choses : l’immigration au Canada,  l’amour de la nature, des couleurs, de la vie, la fascination qu’exercent les couchers de soleil sur nous, une certaine sensibilité envers les choses, les créatures, les gens et ce besoin de mettre des mots sur tout…. Par contre, sa vie est très différente de la mienne. La vie m’a gâtée, moi. Ce n’était pas son cas. 

Comment décrivez-vous votre style d’écriture ? Mon écriture est simple. concise. claire. Et ce n’est pas uniquement par habitude professionnelle. C’est surtout un choix. Mon objectif premier est d’atteindre le plus grand nombre de lecteurs libanais.  Que mes mots coulent avec fluidité, que le lecteur ait l’impression de m’entendre raconter l’histoire ou de la voir défiler simplement devant ses yeux, sans fioritures ni trop de détours. Car, et je ne le cache pas, j’écris pour toucher et provoquer des réflexions. 


Propos recueillis par Jinane Milelli. 


Roula Azar Douglas est auteure, journaliste, enseignante universitaire, conférencière. Elle écrit pour provoquer des réflexions, pour contribuer à l’évolution des mentalités, pour une société plus juste, plus humaine, plus égalitaire. Engagée pour l’égalité des genres, elle prépare actuellement une thèse de doctorat en sciences humaines. Le jour où le soleil ne s’est pas levé est son second roman.

Mes réponses aux questions d'Emmanuel Khoury de L'Orient-Le Jour à l'occasion du lancement de mon roman Le jour où le soleil ne s'est pas levé

« La réalité est faite de nuances... »

D’où vous vient le besoin de plonger dans des sujets qui dérangent ? De mon sentiment d’appartenance et de responsabilité envers la société et de mon incapacité à accepter le regard binaire que portent certains sur le monde. Les gens, très souvent, pensent par opposition. C’est tout noir ou tout blanc pour eux. Or la réalité est faite de nuances. C’est particulièrement vrai pour l’euthanasie, l’avortement, tous les sujets qui touchent l’être humain. 
Quel rapport entretenez-vous avec le silence ?   Le silence est multiple. Il peut être langage, écoute, communion. Il peut être aussi synonyme d’indifférence, d’absence, de repli sur soi. Le silence imposé est une forme de violence, qui sans coups, peut faire très mal. Par contre, c’est dans le silence que je m’entends le plus.
Quel est cet espoir que vous cherchez à montrer ?   L’espoir que d’une manière ou d’une autre, après une perte importante, pourvu qu’il le veuille, l’être humain retrouvera des raisons de sourire. Je suis persuadée qu’il y a toujours un nouveau printemps pour celui qui veut bien entendre le chant des oiseaux.
Comment trouvez-vous la force de sourire face à l’adversité ? Je plonge dans l’action. Je bouge, je me débats et je me bats. Cela génère de l’énergie pour mieux lutter et me protège de la noyade.
Comment est perçue dans le Moyen-Orient une femme comme vous qui traite de questions de droits des femmes… ?   Le Moyen-Orient est multiple. Pour certains, elle est perçue comme une actrice du changement, pour d’autres, comme une menace pour l’ordre social.
Quelle est votre vision de l’avenir concernant la liberté d’expression des femmes dans cette région du monde ?   Aujourd’hui, de plus en plus de femmes et d’hommes sont inquiétés pour leurs idées et opinions. La liberté d’expression recule de façon inquiétante. L’avenir paraît sombre en ce qui concerne la liberté d’opinion, et malheureusement cela est vrai partout dans le monde.

L'article d'Emmanuel Khoury publié dans L'Orient-Le Jour du samedi 10 novembre 2018 sur mon nouveau roman Le jour où le soleil ne s'est pas levé

Roula Azar Douglas n’a pas peur des sujets difficiles

Roula Azar Douglas

Roula Azar Douglas n’a pas peur des sujets difficiles. Infatigable, cette intellectuelle libanaise, fervente militante des droits des femmes, œuvre sur plusieurs fronts : elle est professeure à l’Université libanaise et à l’Université Saint‑Joseph, membre du groupe consultatif de la société civile auprès d’ONU‑femmes pour les États arabes et journaliste à L’Orient‑Le Jour où elle est responsable de rédaction de la page L’Orient des Campus. En plus de ces multiples activités (elle prépare actuellement une thèse de doctorat en sciences humaines), elle a trouvé le temps d’écrire Le jour où le soleil ne s’est pas levé, un court roman de 131 pages qui ne devrait laisser aucun lecteur indifférent. Le livre démarre in media res dans la salle d’audience de la Cour supérieure du tribunal de Montréal. Le ton est donné dès les premiers mots : nous parlerons de la mort. La mort dans ce qu’elle peut avoir de plus tragique, dans toute sa gratuité, dans toute sa complexité. Noura Khoury et son mari Danny Denunzio vivent une vie à la fois tumultueuse et paisible au Canada. Un amour parfait unit cette jeune artiste peintre prometteuse, à la fois pleine de vie et mystérieuse, à Danny, journaliste de guerre salué pour ses reportages. Mais le destin, un jour de janvier de l’an 2009, vient bouleverser l’existence du couple. Sans jamais s’éloigner des questions épineuses et délicates qu’elle cherche à exposer à son lecteur, Roula Azar Douglas compose sur fond de prosopopée un roman polémique qui donne matière à réflexion et à discussion. L’omniprésence du thème de la mort, l’évocation ponctuelle de Dieu, la fonction des rêves ou encore la question du contrôle de l’homme sur sa destinée soulèvent en contrepoids celui de l’existence et de ses conditions, comme le fait dire à un de ses personnages Roula Douglas : « C’est la mort qui donne à la vie toute sa densité… parler de la mort, c’est parler de la vie. » Sorte de roman philosophique, ou fiction enracinée dans l’implacable réalité du pire, Le jour où le soleil ne s’est pas levé est aussi l’occasion pour Roula Azar Douglas d’explorer différents techniques et procédés narratifs, alternant entre prose romanesque, entretien journalistique et même poésie versifiée. Cette langue, qui évolue au fur et à mesure du livre, ne doit jamais s’élever vers une quelconque recherche poétique, et restera toujours sobre et claire, directe et parlant à tous. Avec un objectif assumé : toucher le lecteur, le bousculer, le déranger pour l’emmener sur un terrain sensible et susciter en lui une prise de conscience à propos d’un problème sociétal actuel qui sclérose les opinions publiques. Rendez‑vous le 11 novembre pour la signature du livre, qui sera précédée à 17h30 par une discussion sur le thème Mourir dans la dignité, réflexions sur la fin de vie, organisée à la salle 1 Antoine Sfeir. La table ronde sera animée par Roula Azar Douglas elle‑même. Elle réunira Leila Saadé, présidente de l’École doctorale de droit du Moyen‑Orient, fondatrice et directrice pendant 15 ans de la filière francophone de droit de l’Université libanaise, Thalia Arawi, directrice fondatrice du programme Sélim Hoss en bioéthique et professionnalisme de l’Université américaine de Beyrouth, et Rana Yamout, médecin anesthésiste spécialiste du traitement de la douleur et des soins palliatifs, cofondatrice de l’unité des soins palliatifs à l’Hôtel‑Dieu de France.

Au Liban, le familialisme politique et la marginalisation des femmes

La structure politique libanaise donne naissance à des éléments toxiques qui entravent la participation politique des femmes et empêchent l'État de devenir une véritable démocratie.

« La cause profonde de la sous-représention des femmes en politique au Liban est enracinée dans le familialisme qui sévit dans les partis politiques dominants. » C'est l'une des conclusions d'un intéressant mémoire réalisé par une jeune étudiante palestinienne, Hind Sharif, au Centre interuniversitaire européen pour les droits de l'homme, à Venise en Italie, et qui lui a valu la meilleure note de sa promotion et les félicitations de ses professeurs. Menée dans le cadre d'un master en démocratie et droits de l'homme dans la région MENA dont un semestre a été effectué à l'Université Saint-Joseph à Beyrouth, cette recherche a également montré que le système libanais du partage du pouvoir perpétue les clivages entre les différentes communautés confessionnelles et renforce l'hégémonie des leaders.


« Alors que le familialisme politique est considéré être à l'origine de la discrimination contre les femmes en politique, ce système est renforcé et soutenu par le système électoral en vigueur (ancienne loi) et la formule sectaire de partage du pouvoir. Cet arrangement a ancré les polarisations entre les communautés confessionnelles et a permis aux familles puissantes de maintenir leurs positions héréditaires et leur statu quo, régénérant ainsi un système politique dominé par les hommes et par les clans », explique la jeune chercheuse de 23 ans originaire de Ramallah. Hind, qui effectue actuellement un stage au Parlement européen à Bruxelles au sein de l'Unité d'action pour les droits de l'homme de la Direction générale des politiques externes de l'Union, poursuit : « La structure politique libanaise donne naissance à des éléments toxiques qui entravent la participation politique des femmes et empêchent l'État de devenir une démocratie véritable et fonctionnelle. »
Vaste recherche qualitative
« Alors que l'État libanais a réussi à donner une image libérale de son traitement des femmes, le Liban souffre d'avoir l'un des taux les plus faibles de participation politique des femmes dans la région arabe et dans le monde. Selon l'Union interparlementaire, en 2017, le Liban se classait au 185e rang sur 193 pays dans la classification mondiale de la représentation des femmes au Parlement, avec 3,1 % de femmes au Parlement. C'est plus ou moins le même taux de participation que des pays réputés pour être considérablement plus conservateurs que le Liban, tels que la République islamique d'Iran (3,1 %) ou le Bahreïn (2,7 %) », souligne Hind Sharif.
Intriguée par le décalage entre « la présence et la réussite des femmes libanaises dans les milieux éducatif, social et économique » et « leur très faible participation en politique », la jeune chercheuse mène une vaste étude qualitative sur la participation politique des femmes au Liban et les causes de leur presque absence du pouvoir. Elle interroge des experts, rencontre des candidates aux élections municipales et parlementaires, prend part à un groupe de discussion et effectue une large recherche documentaire. « Les plus grandes difficultés que j'ai rencontrées dans le cadre de ma recherche étaient les contraintes de temps et le manque de contacts. J'ai cependant pu les surmonter grâce à l'aide généreuse de diverses organisations, activistes, collègues, universitaires et étudiants qui ont vraiment rendu cette recherche possible », confie Hind qui tient à remercier tout particulièrement sa directrice de mémoire, la professeure Fadia Kiwan, « dont l'expertise, le soutien et les idées ont contribué à la richesse de cette recherche ».
Reconnaître les lacunes Le familialisme politique au Liban aurait un lourd impact non seulement sur la participation politique des femmes mais également sur la carrière politique des hommes qui viennent de l'extérieur du cercle proche des leaders. « Les aspirants politiques au Liban, qu'ils soient hommes ou femmes qui ne font pas partie des familles au pouvoir ou de leurs réseaux proches trouvent qu'ils ne peuvent pas accéder à des postes élevés au sein des partis politiques, même s'ils ont acquis les compétences nécessaires ».
Lorsque la plupart des recherches précédentes sur la participation politique des Libanaises mettent l'accent sur deux obstacles-clés qui entravent l'accès des femmes aux postes décisionnels : le patriarcat et le système politique sectaire, l'étude de Hind Sharif montre que le système politique sectaire et la société patriarcale au Liban ne sont pas à l'origine de la marginalisation politique des femmes, mais qu'ils la renforcent et la perpétuent. « Ce sont les structures profondes qui façonnent le système politique libanais et les caractéristiques internes des partis politiques, enracinés dans le familialisme politique et les réseaux clientélistes, qui en sont la première cause », souligne la jeune chercheuse.
Les conclusions de cette recherche pourraient servir à trouver des solutions appropriées et efficaces à la faible participation politique des femmes au Liban. « Si l'adoption d'un quota est nécessaire pour renforcer la participation politique des femmes, cette démarche doit s'accompagner d'initiatives de démocratisation visant à affaiblir les caractéristiques familiales et clientélistes actuelles qui dominent le système politique libanais », estime la jeune étudiante.
« Un nombre croissant de pays ont adopté des lois pour réglementer le fonctionnement des partis politiques. Le Liban n'a pas encore de telles lois. L'adoption de mesures pareilles affaiblirait l'autocratie au sein des partis politiques et diminuerait le leadership perpétuel des partis et le familialisme politique, ouvrant la voie à de nouveaux candidats et renforçant la démocratisation des partis », indique encore Hind Sharif. Et de conclure : « La réforme nécessite une décision politique et une volonté de reconnaître les lacunes dans le modèle démocratique du Liban et son exclusion de femmes compétentes de la politique (et d'hommes compétents qui viennent de l'extérieur des familles politiques et de leurs proches). Je crois fermement que mener des recherches dans ce domaine est une étape importante pour plaider et faire pression pour la mise en œuvre de ce changement. »

« Il ne suffit pas d’avoir un diplôme, il faut également posséder des compétences »

Construire le nouvel espace universitaire francophone comme réponse aux grands défis auxquels font face les établissements, tel est l'objectif principal de l'AUF pour les prochaines années, confie Sorin-Mihai Cîmpeanu.

En réponse aux besoins des établissements membres d'enseignement supérieur et de la recherche face aux grands défis qu'ils rencontrent et en mettant en avant la solidarité active entre ses universités partenaires, l'AUF entend construire le nouvel espace universitaire francophone (NEUF).
« Neuf, c'est également le nombre des priorités sur lesquelles repose notre nouvelle stratégie », précise Sorin-Mihai Cîmpeanu, président de l'Agence universitaire de la francophonie (AUF), de passage au Liban pour le colloque annuel de l'AUF organisé à Beyrouth les 7 et 8 novembre. Homme aux multiples casquettes, le recteur de l'Université des sciences économiques et de médecine vétérinaire de Bucarest, député au Parlement de la Roumanie et membre de la délégation du Parlement de la Roumanie à l'Assemblée parlementaire de la francophonie (APF), a défini pour « Campus » la nouvelle stratégie de l'AUF adoptée à la 17e assemblée générale de Marrakech au mois de mai dernier. « Le premier défi est celui de la qualité. La qualité de la formation, celle des étudiants, mais aussi celle des enseignants, la qualité de la recherche scientifique et celle de la gouvernance des établissements d'enseignement supérieur. »
Le deuxième volet de la nouvelle stratégie de l'AUF porte sur l'employabilité et l'insertion professionnelle des diplômés. Pour trouver des solutions concrètes aux difficultés d'intégration des diplômés sur le marché de l'emploi, l'AUF veut intensifier le dialogue entre le monde académique et les milieux économiques, mieux « adapter les formations offertes aux besoins socio-économiques » et encourager chez les étudiants l'esprit entrepreneurial. « Les entreprises apprécient de moins en moins les diplômes. Elles recherchent des habiletés. Aujourd'hui, avec la technologie, nous avons accès en un clic aux connaissances et à l'information. Il faut que les diplômés sortent des universités avec des compétences. Il ne suffit pas d'avoir des diplômes », insiste le président de l'AUF. Une constatation que cet ancien ministre de l'Éducation et de la Recherche scientifique en Roumanie avait déjà faite il y a une quinzaine d'années. Alors professeur en génie, il avait recruté ses étudiants les plus brillants pour l'entreprise multinationale qu'il dirigeait. « À mon grand étonnement, les bons résultats universitaires des diplômés que j'ai sélectionnés ne se sont pas traduits par de bonnes compétences dans le milieu du travail », confie-t-il.
« Le rôle des établissements d'enseignement supérieur comme moteur de développement local et régional est au sein de notre troisième grand défi », poursuit le président de l'AUF, qui entend renforcer la contribution des établissements membres au développement économique, social, environnemental, culturel, linguistique et interculturel. Et d'ajouter : « Les universités ont un rôle important à jouer dans la promotion de la paix et de la diversité culturelle. »

Égalité hommes/femmes
Le très dynamique président de l'AUF confie que parmi toutes les fonctions qu'il a occupées dont le poste de Premier ministre par intérim du gouvernement de la Roumanie en 2015, « être le président de l'Agence universitaire de la francophonie est le plus honorable ». « C'est également une grande responsabilité. Les objectifs sont très importants et la couverture de l'AUF est très large », souligne Sorin-Mihai Cîmpeanu.
Répondant à une question sur le rôle de l'AUF dans la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes auprès de ses établissements membres, le président de l'AUF est revenu sur la conférence internationale des femmes de la francophonie, organisée à Bucarest les 1 et 2 novembre par la Roumanie et l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) sous le thème « Création, innovation, entrepreneuriat, croissance et développement : les femmes s'imposent ». Et de préciser : « Un réseau de femmes francophones entrepreneuses a été mis en place au cours de cette conférence. Et je me suis vu recevoir une décoration de la part de l'ONU-section femmes pour le soutien de l'égalité hommes/femmes, et dont je suis très fier. »